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Les Coups de coeur du printemps

9 juin 2007 – Après la revue des vins sélectionnés au mois de mars, la dégustation des coups de cœur du printemps a permis de déguster une sélection de flacons alsaciens de grande qualité, parmi les meilleurs de la région dans leur catégorie de terroir et de prix. Lire le compte rendu des 13 vins dégustés de 2006 à 2003. 13 coups de coeur de 13 domaines ayant chacun leur histoire, avec un enthousiasme personnel qui se combine à une haute appréciation qualitative.

1. Pour une mise en bouche, un muscat 2006

Muscat Brandhof 2006 – Rémy Gresser (Andlau, 7.50€)
Terroir calcaire sur Andlau en direction d’Itterswiller, le Brandhof  produit des vins profond, de grande garde. Issu de cépages muscat d’Alsace et muscat Ottonel, le muscat 2006 de Rémy Gresser offre le nez de raisin frais et le croquant en bouche d’un muscat jeune et fringant. Derrière le coté variétal se dévoile déjà la profondeur, la pureté et la minéralité d’un vin de terroir, avec une finale plus saline. Encore jeune c’est un vin qui devrait bien évoluer sur plus de 10 années.  Déjà en bouteille et probablement épuisé avant la fin de l’été. Très Bien

2. Pour continuer, deux rieslings de terroir

Riesling Fronholtz 2005 – Claude et Louis Hauller (Dambach la Ville, 7.50€)
Bien ancré à Dambach la Ville, le domaine exploite quelques vignes sur Epfig, dont un excellent Riesling Fronholtz. Le vin se montre frais et jeune avec un nez floral qui évolue sur le minéral avec des notes de pamplemousse. La bouche est fine, minérale et mûre avec une belle pureté et cette acidité verticale d’une grande finesse qui signe les vins du Fronholtz. Déjà délicieux avec une belle amertume en finale, le vin se montre délicat et très  plaisant. A boire ces dix prochaines années. Très Bien

Riesling 111 ans 2005 – Cave de Ribeauvillé (7.70€)
La cuvée 110 ans avait été crée en 2004 pour l’anniversaire de la cave. Issue d’une sélection sévère des meilleures grappes de la cave originaires des terroirs calcaires autour de Ribeauvillé, la cuvée a eu un tel succès que l’expérience a été renouvelée en 2005. Superbe initiative car cette cuvée est un véritable vin de terroir : le nez de fleur blanches montre une belle minéralité, et la bouche tout en ampleur offre une belle puissance avec une acidité profonde. Le vin se goûte déjà bien mais vieillira très bien. Voilà l’une des cuvées dont la cave de Ribeauvillé a le secret, qui témoigne des efforts qualitatifs entrepris. En vente au caveau seulement, bien entendu ! Très Bien

Des deux rieslings, le Ribeauvillé gagne les suffrages des amateurs de puissance habitués au style particulier des terroirs de Ribeauvillé. Le Fronholtz, plus féminin pour certains, présente une finesse de style très différente, qui a également ses fans. Poissons de mer et poissons de rivière se partageront l’un et l’autre, pour le plus grand bonheur des amateurs de vins de terroir alsaciens qui trouveront ici un superbe rapport qualité/prix.

3. Deux pinots gris secs parfaits à table

Pinot Gris « K » 2005 – Paul Kubler (Soultzmatt, 6.80€)
Le sigle K signifie Kubler, c’est la marque qui signe les vins de cépage de la gamme. Philippe Kubler a fait ses classes en bourgogne avant son arrivée au domaine familial en 2004, et l’élevage sur lies (2/3 en foudre, 1/3 en pièce) est parfaitement maîtrisé. Issu d’un coteau sur terroir gréseux, le vin présente un nez élégant sur la noisette et le silex avec un toasté encore présent en comparaison de l’autre vin. La bouche est fine, minérale et très pure avec du gras, procurant un grand plaisir de dégustation. A boire sans trop se presser dans les 5 prochaines années. Les amateurs de ce style de vin auront plaisir à goûter toute la gamme 2005 de ce producteur très prometteur. Très Bien

Pinot Gris Tradition 2005 – André Pfister (Dahlenheim, 7.80€)
Bien caché dans un village peu médiatisé mais situé au cœur de beaux terroirs en contrebas du mont Scharrach, André Pfister régale ses clients fidèles depuis plus de 20 ans. Le retour de sa faille Mélanie bouscule les habitudes de la maison, et fait apparaître les vins sur la scène des dégustations. Pour le plus grand plaisir des amateurs de vins droits et secs qui trouveront ici un vin proche de la perfection : un nez franc et très typé pinot gris, avec des notes de noisette, de miel et de froment, qui laisse a place à une bouche charnue, pure et légèrement douce avec une finale plus épicée. S’il fallait partir sur une île déserte avec un seul vin, cete cuvée … Très Bien

Comparaison intéressante de vins destinés à la consommation à table. La pureté du vin de Pfister et la richesse et le gras de celui de Kubler trouvent chacun leurs amateurs. Deux pinots gris exemplaires de ce que devrait être un bon pinot gris alsacien, gras et ample avec un équilibre sec. En espérant que ces deux cuvées créent des émules.

4. Deux vins de terroir calcaires

Après les vins de fruits, quelques vins au terroir plus prononcé.

Muscat Grand Cru Mambourg 2005 – Maurice Schoech (Ammerschwihr, 9.50€)
Amateurs de muscat grand cru, cette cuvée est probablement un incontournable dans votre cave. Le Mambourg avec ses argiles riches en fer sur un socle calcaire marque déjà le nez qui présente des notes de fruits rouges et de fumée, la citronnelle et le raisin tentant de rappeler le cépage d’origine. La bouche est charnue, légèrement moelleuse avec une sève dense qui donne de la profondeur au vin. La matière est dense et le vin réussit à combiner la finesse du cépage avec la profondeur du terroir. Bien sur c’est un vin d’apéritif parfait, et il accompagnera parfaitement un feuilleté aux fraises. Mais avec un peu d’imagination, on imagine des gambas rôtis à la citronnelle, des Saint-Jacques à l’aigre douce ou encore des A un tel prix, ne vous étonnez pas s’il n’y a plus rien à vendre dans pas longtemps. Excellent.

Riesling Grand Cru Goldert 2005 – Ginglinger-Fix (Voegtlinshoffen, 9.80€)
Autre perle du vignoble bien cachée, le domaine Ginglinger Fix possède une petite parcelle dans le Grand Cru Goldert. Vinifié à la perfection dans un grand millésime par Eliane Ginglinger, le Riesling Goldert 2005 possède un équilibre sec (environ 6g/l de résiduel) et minéral qui n’enlève rien du coté exotique du cru : un nez d’agrumes confits et d’ananas avec une note fumée, en parfaite harmonie avec une bouche à l’acidité mure, qui termine sur des arômes de physalis et de pamplemousse. Déjà approchable, voilà un riesling très consensuel qui vieillira très bien. Si de passage au domaine vous dégustez le riesling VT 2004 du même domaine, n’oubliez pas qu’il vient de cette même parcelle de grand cru, même si l’AOC Grand Cru n’est pas revendiquée. Excellent

Mambourg et Goldert, deux des plus grands terroirs alsaciens, ont produit des vins magnifiques dans le grand millésime 2005. Si le consensuel Goldert remporte les suffrages, le Mambourg étonne par sa typicité.

5. Deux Gewurztraminers fins et minéraux

Pour continuer sur la veine des terroirs, nous abandonnons un temps le calcaire pour retrouver des gewurztraminers sur des sols plus légers.

Gewurztraminer Grand Cru Brand Cuvée Angélique 2005 – Hurst (Turckheim, 11.50€)
Le granit du Brand et la maturité du millésime 2005 apportent une dimension inhabituelle à cette cuvée. Le nez prend des arômes d’épices douces, de réglisse et de fruits mûrs, procurant une élégance qu’on retrouve en bouche avec une belle netteté, une minéralité présente et un équilibre demi-sec qui termine sur d’agréables notes de noisette. Un gewurztraminer aérien d’une grande finesse, parfait à table sur une cuisine exotique fine. Très Bien

Gewurztraminer Grand Cru Kessler 2005 – Dirler Cadé (Bergholtz, 20€)
Une cuvée riche et légèrement surmurie, au nez de rose qui présente des notes fumées. La bouche combine la pureté d’une vendange mure très bien travaillée et la finesse d’un terroir de grès parfaitement adapté au gewurztraminer. 2005 a donné un vin puissant qui marque fortement la langue, avec un moelleux et un minéral très présents qui donnent un toucher de bouche impressionnant. La finale sur des fleurs blanches enfonce le clou de cette cuvée d’exception. A garder quelques années pour que l’ensemble se fonde, voilà un grand gewurztraminer Kessler. Excellent

6. Deux pinots noirs 2005

Les pinots noirs étaient au frais, ce qui nous a empêché de les goûter en début de dégustation. Nous les avons dégustés vers la fin de la dégustation, juste avant les moelleux.

Pinot Noir Rouge de Marlenheim cuvée Tradition 2005 – Romain Fritsch (Marlenheim, 7.30€)
Romain Fritsch produit du pinot noir sur les calcaires du grand cru Steinklotz. Une cuvée de base est généralement complétée par un rouge de Marlenheim décliné en Cuvées Tradition et lorsque le millésime le permet Barrique. A partir du millésime 2005, des parcelles issues de la partie plus caillouteuse et plus pauvre du terroir sont utilises pour la cuvée Tradition. Ce millésime ne produira pas de cuvée Barrique, et si la cuvée Tradition 2005 possédait un fruit mur et dense très souple lors de la dernière dégustation en cuve, la mise en bouteille récente lui a donné un coup de massue et le vin ne se goûte pas très bien : nez kirsché, bouche qui manque de finesse et d’ampleur, le vin parait fatigué. Le vin ne sera pas à la vente avant l’automne, à juste raison.  Un vin à regoûter. Bof

Pinot Noir Quintessence 2005 – Gérard Neumeyer (Molsheim, 7.95€)
Le millésime 2003 avait donné l’occasion d’un tri de la vendange  de pinot noir pour séparer les plus belles grappes et en faire une cuvée quintessence. En 2005, le domaine récidive avec une superbe vendange, moins surmaturée qu’en 2003. La robe est dense et profonde. Le nez est parfumé, avec des arômes de fruits noirs et de fumée. La bouche est concentrée, souple en attaque puis charnue avec une extraction de tanins gras remarquable. L’acidité combinée à cette matière donne une belle charpente à ce vin doté d’une longue finale sur les petits fruits rouges. Déjà plaisant jeune mais qui supportera une bonne garde.  Très Bien

7. Deux vins moelleux et profonds

Pour terminer en beauté, deux vins plus doux sélectionnés pour leur minéralité, leur profondeur et en même temps leur élégance. Deux vins hors norme à déguster pour eux même.

Gewurztraminer Grand Cru Mambourg 2003 – Marc Tempé  (Zellenberg, 26€)
Les Grands Crus 2003 de Marc Tempé sortent un à un à la vente après un long élevage, et révèlent le travail réalisé dans les vignes. Issu de vignes de plus de 60 ans d’âge, ce gewurztraminer présente un nez de fruits murs complété par des arômes de fumée et de cuir très fréquent sur ce terroir, ce qui n’est sa sans rappeler le muscat bu plus tôt.  La bouche est ample, minérale et très concentrée avec une charpente acide remarquable, évoluant sur des notes d’agrumes avec un moelleux qui se fait plus présent. La fin de bouche est longue, à la fois pure, minérale et moelleuse. Un vin de grande garde. Excellent

Muscat Grand Cru Vorbourg Clos Saint Landelin Vendanges Tardives 2004 – René Muré (Rouffach, 36€)
D’année en année, le muscat Clos Saint Landelin Vendanges Tardives de René Muré s’impose comme l’un des vins les plus marquant d’Alsace. Bénéficiant du sol et du climat spécial du Clos, le muscat s’approprie la surmaturité sans perdre de sa structure. Si les millésimes 1989, 1992 ou 1994 sont remarquables, un palier est franchi avec cette cuvée 2004. Le travail des sols et de la vigne combinée à l’utilisation d’un pressoir vertical pour les VT et SGN a donné un vin hors norme : le nez de menthe, de miel et de fruits frais développe de la complexité à l’aération, et laisse place à une bouche moelleuse profonde et très pure. La finesse et la fraicheur ne sont jamais prises en défaut par la surmaturité ou le moelleux, et l’ensemble possède l’équilibre magique des grands vins moelleux. Déjà délicieux maintenant, certainement encore mieux dans 5 ans, c’est un vin à encaver d’urgence qui testera la patience des amateurs. Vin le plus cher de la dégustation, il n’en reste pas moins d’un excellent rapport qualité prix. Excellent, voir beaucoup plus.

Le Clos Saint Landelin produit des muscats moelleux de grande classe depuis plusieurs années, qui rappellent les plus grands muscats du Sud de la France. En 2004, l’équilibre est magistral avec un nez très pur sur les fruits exotiques, l’abricot et la menthe, laissant place à une bouche moelleuse, pure et très profonde qui conserve beaucoup de finesse.

Rassembler des coup de cœur en une seule dégustation pose le problème du classement relatif, un peu comme lorsqu’au lycée on regroupe des premiers de la classe de plusieurs collèges. Le groupe de participants était là pour apporter sa propre sensibilité, et par delà les qualités propres de chaque vin, la diversité des styles proposés a montré une fois de plus qu’il est important de trouver des vins qui soient à son propre goût, avant de chercher les meilleurs vins proposés dans ce style.

Les dégustations de l’Oenothèque Alsace remplissent cet objectif, les participants ayant à chaque dégustation l’occasion de découvrir des styles nouveaux et progressivement de comprendre quels sont les styles qu’ils préfèrent.

Thierry Meyer

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