L'Oenothèque Alsace

OENOALSACE.COM

Dîner autour des vins de Zind-Humbrecht

Dîner autour des vins de Zind-Humbrecht
22 janvier 2005
Dans le cadre du Weekend autour du Domaine Zind-Humbrecht

Plus tard en soirée, nous nous retrouvons à la Taverne Alsacienne pour mettre les vins en situation. Marc et Anne-Marie Tempé nous ont rejoint pour nous accompagner dans la dégustation des vins. Philippe Guggenbuhl nous a concocté un menu à la hauteur des vins servis, et les commentaires seront intéressants car les vins servis ont suscité de nombreuses remarques. Je craignais un peu de voir une série de « Ohh » et de « Aaahhh » en guise d’appréciation, mais la lucidité des participants a permis de dégager quelques préférences intéressantes. 



 


En Apéritif, avec une émulsion de saumon fumé au filet d’anchois, les vins hors norme

Zind 2002 – Zind-Humbrecht : le nez est fin, floral, mûr avec des arômes de fruits blancs. La bouche est grasse, parfumée, avec une belle acidité. Un vin gras et puissant qui conserve un coté pinot blanc très marqué, simplement en plus concentré. Le vin le moins cher du domaine, environ 19 euros, possède déjà des qualités indéniables. Très Bien.


SylvaneR 1999 – Zind-Humbrecht : l’anecdote semblait intéressante avec ce sylvaner issu d’une parcelle achetée et arrachée la même année dans un Grand Cru situé très au sud de l’Alsace. Malheureusement, certaines bouteilles sont reparties en fermentation, c’était le cas de cette bouteille : le gaz et l’oxydation ont détruit la minéralité de ce flacon. Beurk.


Sur le Capuccino de Foie Gras d’Oie, Emulsion de Pain, les vins de terroirs « village »

Intéressant de goûter les vins du Herrenweg, normalement pas voués à une trop grande garde.


Riesling Herrenweg 1995 – Zind-Humbrecht : Le nez est métallique, rappelle une vieille cave, légèrement évolué, un peu oxydé, pas très net. La bouche est citronnée et alcaline, avec un profil aromatique décevant. Il s’agit d’une des premières bouteilles qui ont rempli ma cave, elle a donc connu plusieurs déménagements et des conditions de stockage pas idéales. Le vin en a visiblement pâti. Beurk


Pinot Gris Vieilles Vignes 1995 – Zind-Humbrecht : Le nez est beaucoup plus franc, grillé, avec des notes de caramel et d’abricot sec. La bouche est fine, moelleuse, avec une belle acidité, même si l’équilibre fragile fatigue rapidement à l’aération. Un vin à boire sans trop tarder, qui a mieux résisté à ma cave que le riesling. Bien


L’entrée possède un coté onctueux que l’acidité du pinot gris arrive à équilibrer. Le pain au sésame légèrement grillé accompagne bien la surmaturité du vin.


Sur l’Escalope de Bar de Ligne, Crème de Ciboulette, les vins minéraux d’hier et aujourd’hui

Muscat Grand Cru Goldert 2001 – Zind-Humbrecht : Le nez est très minéral avec des arômes de bourgeon de cassis et de buis qui rappellent un sauvignon blanc de Loire. Des notes mentholées viennent compléter ce profil atypique. La bouche est citronnée, très vive, avec beaucoup de minéralité. Insuffisamment carafé (30min au lieu de 3 heures), le vin n’a pas donné toute sa mesure mais étonnait pas sa minéralité. Très Bien


Muscat Grand Cru Goldert 1988 – Zind-Humbrecht : la version 13 ans plus âgées se montre plus typique : le nez est mentholé, herbacé avec beaucoup de fraîcheur et une bonne complexité. Des notes d’encaustique apparaissent avec la montée en température. La bouche reste sèche avec une forte vivacité, avec beaucoup de finesse et une finale un peu végétale. Un muscat indestructible, dans un style vif qui passe assez bien à table. Bien


Riesling Grand Cru Brand 1998 – Zind-Humbrecht : Le nez est très mûr, avec des notes d’abricot, d’ananas, de miel , mais laisse également apparaître une acidité volatile assez élevée. L’attaque en bouche est sèche en comparaison du nez qui laisse présager un peu plus que les 8g/l de SR du vin. Le milieu de bouche développe un peu de gras, mais garde cette acidité volatile assez sensible. Moins équilibré qu’en Octobre dernier. Très Bien


Riesling Grand Cru Brand 1986 – Zind-Humbrecht : Le nez est très complexe, avec un peu d’encaustique, de menthe poivrée, et du pamplemousse. La bouche est pure, acidulée, possède beaucoup de finesse avec une petite douceur très fondue (18g/l de SR) qui vient accompagner la longue finale. L’équilibre est remarquable pour ce vin qui se présente très bien.. Une jeunesse exemplaire, et un vin excellent. Excellent


Le dernier vin s’accorde particulièrement bien avec le poisson qui est parfaitement cuit, grillé sur le dessus sans être sec. Un accord de texture sur la minéralité du vin.



 


Avec la Sole façon Meunière, Fricassée de Homard, Sauce à l’Aigre-douce, les vins stars chez Robert Parker

Pinot Gris Clos Windsbuhl Vendanges Tardives 1994 – Zind-Humbrecht : La robe se fait plus dorée que les vins précédents. Le nez est très parfumé, fin, avec des arômes d’abricot rehaussées de notes fumées et grillées. A l’aération il prend de l’ampleur, et on ne se lasse pas de le sentir. La bouche est finement acidulée, la liqueur est très présente mais sans donner une impression pâteuse malgré les 120g/l de SR. L’acidité du Windsbuhl donne ici une finesse telle qu’on obtient un équilibre proche de la perfection. Un vin sublime. Excellent, voir plus…


Pinot Gris Grand Cru Rangen Vendanges Tardives 1994 – Zind-Humbrecht : Le nez se fait plus minéral, avec des notes iodées venant compléter le coté fumé et grillé. La bouche semble plus liquoreuse que le précédent à cause d’une présence de botrytis plus forte, les sucres étant similaires (118g/l). L’acidité volatile est à nouveau assez présente, ce qui donne un vin extrême, complexe, puissant, mais qui n’a pas le charme ni l’équilibre du Windsbuhl. Le terroir est très présent malgré le botrytis, mais cette expression convient peut-être moins à un pinot gris VT que le Clos Windsbuhl. Très Bien


Coté plats, les deux vins se marient à merveille malgré leurs sucres. Le Windsbuhl a une petite préférence pour la texture du poisson, alors que le Rangen passe finalement bien avec la fricassé de homard. 



 


Le Fromage de Munster en Trois Façons autour des Gewurztraminers du domaine

Gewurztraminer Heimbourg 1995 – Zind-Humbrecht (demi-bouteille) : Le nez est parfumé, avec des arômes de fleurs séchées, de foin et de cuir, qui rappellent un peu certains single malt whiskies. La bouche est ronde, avec un alcool assez sensible, la puissance du vin dominant le léger sucre au point de donner une impression sèche. L’équilibre est surprenant, et ne va pas se fondre avec le temps. Un vin un peu extrême dans un millésime difficile pour le gewurztraminer. Bien


Gewurztraminer Grand Cru Hengst 1996 – Zind-Humbrecht : Déjà goûté in-situ, le vin se montre différemment à table. Le nez regorge d’arômes de truffe, au point de masquer un peu les notes de litchi. La bouche est encore jeune, assez sèche avec beaucoup de minéralité. La puissance du vin est remarquable, surtout sur le munster affiné. Excellent.


Gewurztraminer Grand Cru Rangen 1996 – Zind-Humbrecht : Le nez se fait plus exotique, avec du coing et du fruit de la passion, mais reprend également les notes de truffe du précédent. A l’aération on retrouve des notes iodées, presque tourbées. La bouche est très puissante, quasiment sèche, avec des notes de pierre à fusil qui complètent les arômes du nez. Un vin très typé Rangen et très typé 1996. A ne pas mettre entre toutes les mains, ce vin peut surprendre un peu. Très Bien.


Le Munster était présenté sous forme frais (munster blanc, une semaine après la presse), munster affiné, et munster chaud en brick avec de la pomme de terre. Le Hengst se montrait coopératif avec les trois fromages, et il a fallu ajouter une petite tranche de Stilton (fromage anglais à pâte pressée cuite persillée) pour donner le change au Rangen. Le coté salé et persillé du fromage allait particulièrement bien avec le terroir, le cépage étant complètement hors de la discussion.







Tarte Chaude aux Pommes avec les plus grands liquoreux du monde

Riesling Clos Windsbuhl Sélection de Grains Nobles 1989 – Zind-Humbrecht : La robe est dorée, vieil or. Le nez est complexe, fumé, avec du citron confit ainsi que des notes de miel et d’encaustique. La bouche est d’une finesse et d’un gras remarquable, l’équilibre sucre/acide/complexité étant parfait. Indescriptible avec des mots, il faut le goûter ! Un des plus grands vins que j’ai eu l’occasion de boire. Excellent, et même beaucoup plus !


Gewurztraminer Grand Cru Rangen Sélection de Grains Nobles 1989 – Zind-Humbrecht : Le nez est également très complexe, mais sur un registre différent : pralin, truffe au chocolat, miel, cire, on est plus sur un vin liquoreux atteint par le botrytis. La bouche est liquoreuse, grasse et pure avec des notes fumées, une certaine amertume derrière des notes de chocolats, et évolue vers des notes de thé. Le coté tourbé du Rangen se montre discret par rapport au Gewurz Rangen 96. On reste sur un équilibre remarquable et sur un vin qui continue de se bonifier avec le temps. Excellent, voire plus


Pinot Gris Grand Cru Rangen Sélection de Grains Nobles 1993 – Zind-Humbrecht : La robe est proche de celle d’un cognac. Le nez est parfumé, avec des notes de surmaturité et de l’acidité volatile assez élevée. La bouche est fine, liquoreuse, parfumée avec des notes fumées et légèrement iodées. La précision du vin est remarquable, et la minéralité casse un peu la rondeur du milieu de bouche pour donner une certaine amertume. Les amateurs de muscat de Rivesaltes ne s’y retrouveront pas, les autres y verront un exercice intellectuel très valorisant. Dommage de n’avoir pas pu le déguster en compagnie d’Olivier Humbrecht, grand amateur de single malts. Excellent


Une série de liquoreux comme on rêve d’en avoir un jour devant soi. 1989 a déjà montré son énorme potentiel, Le Windsbuhl signe une nième fois un très grand vin, et le Rangen se montre sous deux aspects très différents entre le 89 et le 93. Ces vins là ne sont pas juste des vins sucrés qu’on boit sur un dessert ou avec un foie gras. Il y a de la finesse, de la minéralité, de la complexité, et il faut prendre le temps de les apprécier chacun individuellement. Les deux 89 étaient en bouteille de 75cl, ce qui a permis de servir des doses plus que miniatures aux 14 convives. La tarte chaude aux pommes a agréablement donné le change aux vins, sans les agresser.


Thierry Meyer