Accords mets/vins avec les Rieslings des 24 heures 2004
Des 24h du Riesling qui tombent pendant le passage à l’heure d’hiver, cela devient naturellement les 25h du Riesling. Mais où avons-nous passé la vingt-cinquième heure ? Au top officiel du basculement ? Ou bien quelque part pendant une des deux journées ? Et si c’était à Ingersheim, à l’arrivée d’un de ces plats superbes de Jean-Philippe Guggenbuhl, quand on croit, en effet, que le temps s’est arrêté ? Les lecteurs de DC savent déjà tellement tout de la Taverne Alsacienne d’Ingersheim. Même le visage de Jean-Philippe., concentré comme celui d’un tennisman jouant le 7ème jeu d’un set décisif est connu de beaucoup d’entre vous. (rédaction Philippe Duffourd)
Samedi soir
La Cassolette d’escargots à l’ail et à la crème de Riesling
C’est un classique de la maison dans le sens où l’on s’y raccroche en cas de défaut d’imagination; comme quand on a besoin d’une musique connue par coeur. Et on en profite d’autant plus que, servi en début de repas, l’appétit est fort, comme les arômes de la crème de Riesling. Le Chef joue juste, peut-être quelques décibels se détachent en trop au niveau du sel…ou est-ce mon seuil de perception de ce dernier qui baisse, baisse ? Je ne me risquerai pas à désigner un vin vainqueur par mariage; les notes de chaque convive ayant été assez différentes; mais le Clos Windsbuhl…bon, chut !
Le Filet d’Elbot Sauvage Rôti et sa poêlée de Cèpes des Vosges
Ce fut le chahut de toute la tablée ! Un enthousiasme qui a dû s’entendre en cuisine. L’elbot, poisson des mers du nord, servi le plus souvent fumé, était là traité en filets entiers accompagnés de cèpes d’une telle saveur qu’on n’en croyait pas nos sens. Je n’ai pas le secret des épices utilisées, mais 95% du régal de ce plat provenait de la nature des ingrédients. C’est une constante dans ce restaurant; il n’y a pas pléthore d’ingrédients, pas de mariages follement complexes de notes diverses mais une tonalité impeccable, et des matières premières comme on en rêve. Et je me demande si la relative austérité du Frédéric-Emile en verticale, n’a pas été accentuée par l’extrême lyrisme du plat.
L’Assiette de Homard Breton en Trois Façons
Le homard de Bretagne, les trois sauces très chaudes, fines et élégantes, et tout se termine avec les morceaux de pain pour participer à la pré-vaisselle de nos assiettes…Tout est ramené en cuisine, assiettes raclées jusqu’au dernier atome. Toujours pas de « vainqueur » des accords, mais si l’on souhaite à tout prix m’offrir une bouteille de Clos St-Landelin VT 94, et le homard qui irait avec…
La Sélection de fromages de Jacky Quesnot
L’occasion est belle de voir Jean-Philippe s’asseoir un moment à nos côtés; son équipe et lui-même ont moins de tâches pour ce moment du repas…même si certains pensent déjà au dessert; ou bien pensent-ils déjà au repas du dimanche ?
Tout a déjà été écrit à propos des magnifiques VT et SGN servies à cette heure du soir; et tout aussi sur l’altitude et le vertige devant les premières gorgées de SGN 1976 de Hugel.
Les Figues Fraîches Rôties à la Cannelle et sa Glace Vanille
Jean-Philippe Guggenbuhl conclut ses oeuvres sans effets, sans recherche du drame; le climax de sa soirée est passé; les ingrédients sont toujours de premier ordre, mais la passion n’envahit plus la cuisine. Pas de vins d’ailleurs à ce moment de la nuit, les deux vins dégustés ayant été bus pour eux-mêmes.
Dimanche midi
Le Compressé de Foie Gras de Canard et son Chutney de figues et coing
Un dimanche qui commence par une découverte quasi générale : on peut cuisiner le foie gras de canard des deux façons traditionnelles : un petit passage à la poêle, puis on amalgame finement le tout et on le traite façon terrine. Doucement marbré, fondant, épicé à souhait, belle réussite; le Chef nous propose quelques minutes d’explications de la recette; on essaiera à Noël, mais sachez que la Taverne, sur commande, peut aussi vous préparer ce foie à emporter. Que des grands flacons en face du foie; pas de vainqueur unanime, mais comme j’avais le privilège de déjeuner ce midi aux côtés de Guy Wach, il est évident que la partition du SGN du Kastelberg du Domaine des marronniers m’a apporté un supplément d’âme.
Le Filet de Soles de Petit Bateau aux Nouilles Pyramide – Hommage à Fernand Point
Pas de pyramide au sens architectural, mais Pyramide du nom du Restaurant de Vienne de Fernand Point. La tablée est tellement de bonne humeur à ce « point » du repas que chacun y va de sa plaisanterie : « nous dirons au DCiens qui ont raté l’occasion que nous avons mangé du poisson et des pâtes, il y aura moins de regrets ». Moui, mais vous dirai-je la qualité des soles, et l’incroyable sauce caramélisée aux dizaines de Rieslings de la veille, la plus extravagante des sauces qui ait jamais existé ? Et il fallut mettre ce plat devant un des commandos de Riesling les plus sympathiques du week-end, évidemment. Ahh, le VT 1979 du domaine Weinbach !
Philippe Duffourd