L'Oenothèque Alsace

Dîner des 24 heures du riesling 2004

Dîner des 24 heures du Riesling 2004
30 octobre 2004

Le dîner commence par une dégustation de rieslings riches et jeunes, suivi par des rieslings demi secs et liquoreux.


 


 



Dégustation de vins riches et jeunes


Riesling Grand Cru Pfersigberg 2002 – Emile Beyer : on goûte ce vin pour se recaler le palais sur des millésimes plus jeunes. Le nez est mur, floral avec des notes d’abricot. La bouche est ronde et grasse, équilibrée et parfumée, on sent une légère amertume en finale. La pureté et la netteté aromatique donne l’impression d’un vin très bien fait techniquement, mais qui ne semble pas susciter beaucoup d’enthousiasme dans le cadre de cette dégustation. Erigé en référence dans une dégustation de rieslings du monde (Grande Médaille d’Or 2004 au concours des « Rieslings du Monde » à Strasbourg), cette cuvée montre toutefois la vision d’une expression quasi parfaite du cépage. Certains se posent dès lors la question de savoir s’il faut aimer le riesling pour son caractère variétal ou pour sa capacité à représenter un terroir (Bien)


Première série – à l’aveugle

Riesling Grand Cru Brand 1998 – Zind-Humbrecht : la robe est foncée, dorée. Le nez est très mur, avec des arômes de grillé, de miel et de pralin. La bouche est riche et légèrement moelleuse, avec une bonne acidité et une petite amertume en fin de bouche. Le vin est plus fondu qu’il y a 43 ans, mais le terroir reste encore un peu en retrait. (Très Bien)


Riesling Grand Cru Schoenenbourg 1998 – Bott-Geyl : Le nez est initialement un peu réduit, avec des arômes de bouillon, et prend des notes florales à l’aération. La bouche est sèche, assez vive, avec du gaz perceptible. La fin de bouche est courte et sèche. Le vin aurait eu besoin de plus d’aération pour se montrer sous son meilleur jour, et je me demande s’il n’y a pas un problème de bouchon. D’autres personnes le trouvent Très Bien, j’aimerais bien savoir pourquoi (Bof)


Engelgarten 1998 – Marcel Deiss : Complantation à dominante de riesling, le nez se montre complexe avec des arômes de tilleul, houblon, pierre à fusil. Certaines notes de levures  sont encore présentes à l’ouverture de la bouteille. La bouche est très minérale, mûre avec un bel équilibre. Le terroir est très présent dans cette cuvée, on se demande ce qu’une cuvée 100% riesling donnerait sur le même sol. (Bien)


Deuxième série – à l’aveugle

Riesling Clos Windsbuhl 1999 – Zind-Humbrecht : Le nez est fin, avec des arômes de fruits blanc et de fleur d’acacia. La bouche est grasse, sèche et équilibrée, avec un fondu incroyable et un équilibre qui rappelle les grands bourgognes blancs (Excellent, voir plus) Pour moi le plus beau vin du week-end.


Riesling Clos Sainte Hune 1999 – Trimbach : Le nez est parfumé et reprend des notes de fleurs d’acacia. La bouche est dense et sèche, minérale mentholée avec un peu de réglisse en finale. Moins ouvert que le précédent, a besoin d’un peu de temps pour se fondre. (Très Bien)


Riesling Grand Cru Schlossberg l’Inédit 2001 – Domaine Weinbach : changement de style vers un peu plus de maturité. Le nez est minéral avec un enrobage de surmaturité, avec des arômes de fruits jaunes (pêche). La bouche est minérale et moelleuse, finement acidulée avec un fondu extraordinaire. Si le concept de vin sucraillon désigne un vin dont la seule charpente est le sucre, ici on a tout le contraire : un sapin de Noël dont le tronc est la densité, les aiguilles l’acidité et les guirlandes le sucre. L’association de la minéralité et de la maturité donne un vin demi sec exceptionnel  (Excellent)


Ces deux séries ont introduit une dimension plus concentrée dans la découverte des expressions du riesling. L’acidité est fondue à une matière dense, le sucre résiduel est éventuellement aussi associé à un gras naturel du vin, ce qui donne beaucoup de fondu à l’ensemble.


Troisième série sur le homard

Riesling Grand Cru Schlossberg Vieilles Vignes 1995 – Paul Blanck : Le nez est minéral, fumé avec de l’amande grillée. La bouche est marquée par la surmaturité et la pourriture noble, dans un équilibre acidulé donnant une belle amertume dans la longue finale. (Très Bien)


Riesling Grand Cru Kastelberg 1995 – Guy Wach : Le nez est complexe minéral avec des notes d’anis et d’écorce d’orange. La bouche est riche, souple et grasse, tout en conservant une trame minérale. Ayant goûté le 2001 un peu plus tôt dans l’après-midi, on pense à l’apogée atteint par ce vin. (Très Bien)


Riesling Clos Saint Landelin Vendange Tardive 1994 – René Muré : La robe est dorée. Le nez est très mûr, avec des notes de thé, de bonbon des Vosges (bourgeon de sapin ?), et de caramel. La bouche est riche, acidulée, moelleuse avec beaucoup de maturité. Les arômes du nez se développent fortement en finale, et l’ensemble est fondu. Le cépage disparaît complètement, à l’aveugle je ne suis pas sûr qu’il soit possible de le distinguer d’un pinot gris. Le vin a beaucoup de finesse et de précision. (Excellent)


Cette série montre que le riesling mûr ne masque pas le terroir, avec des cuvées minérales même si les vins sont botrytisés. On dit souvent que les Grands Crus atteignent leur apogée après 10 ans, nous avons ici un exemple très démonstratif.


Dégustation de vins demi secs et liquoreux


On continue la descente des millésimes et l’augmentation du moelleux, les quatre grains nobles accompagnant la sélection de fromages.


Première série

Riesling Grand Cru Rangen 1998 – Zind-Humbrecht : Le nez est mûr, grillé et iodé. La bouche se montre fine et minérale, l’imposant sucre résiduel (34g/l) ne donnant qu’une légère sensation moelleuse. (Excellent)


Riesling Grand Cru Rangen Vendange Tardive 1994 – Domaine Schoffit : le vin est malheureusement bouchonné. (non noté)


Riesling Grand Cru Zinnkoepflé Sélection de Grains Nobles 1989 – Seppi Landmann : La robe devient vieil or, presque ambre. Le nez est mielleux, avec des notes d’encaustique et de foin coupé qui rappellent certains armagnacs. La bouche est fine, ronde, acidulée, avec une belle liqueur. L’ensemble est complètement fondu et bien équilibré. (Très Bien)


Riesling Grand Cru Altenberg de Bergheim Sélection de Grains Nobles 1989 – Marcel Deiss : la robe est un peu plus claire que le vin précédent. Le nez est initialement discret, puis devient doux à l’aération. Les fruits jaunes donnent beaucoup de pureté, et on ne retrouve pas le traditionnel trio miel-pralin-champignon. La bouche est liquoreuse mais très pure, avec un peu de gaz. L’acidité est moins perceptible que dans le vin précédent, et si la première impression est un peu simple et monolithique, à l’aération le vin se montre très pur et bien équilibré en bouche. Peu démonstratif au nez mais superbe en bouche. (Très Bien).


Deuxième série sur le fromage

Riesling Cuvée Frédéric-Emile Sélection de Grains Nobles 1983 – Trimbach : Le nez est parfumé, sur des notes de citron confit, pas du tout évolué. La bouche est minérale, mielleuse, grasse et acidulée. La liqueur est à la hauteur des sucres résiduels (16 g/l), ce qui donne un équilibre de vin gras plus qu’un vin moelleux. Après l’opulence des deux 89, le 83 paraît un peu en retrait et ne fait pas l’unanimité. (Très Bien)


Riesling Sélection de Grains Nobles 1976 – Hugel et Fils : La robe est jaune citron, assez claire. Le nez est très jeune, complexe, sur des agrumes, des épices, des fleurs séchées. La bouche est très fondue, fine et grasse à la fois, avec une bonne structure et beaucoup de fraîcheur. Les 40g/l de sucre ne se sentent quasiment pas, et il n’y a presque aucune trace d’arômes tertiaires ou oxydatifs. Difficile de décrire un tel vin car l’aération le fait évoluer, mais on est sur un très très grand vin. (Excellent, et plus si possible).


Les SGN ont montré à nouveau des profils de vins très différents, tant au nez qu’en bouche, et nous avons fini en apothéose avec un très grand vin. Le Riesling vieux en surmaturité révèle une complexité et une finesse qui sont impressionnantes


Sur le dessert

Riesling Grand Cru Mambourg Vendange Tardive 1998 – Marc Tempé : La robe est jaune citron. Le nez est très parfumé, avec des notes d’ananas peu rencontrées jusqu’ici. La bouche est moelleuse avec beaucoup de fraîcheur, et un bel équilibre avec le fondu du sucre. (Très Bien)


Riesling Clos Saint Landelin Sélection de Grains Nobles 1990 – René Muré : Dernier vin de la soirée, et pas n’importe lequel ! La robe est dorée, le nez est intense sur un mélange de miel et de citron avec une touche d’évolution et une bonne minéralité. La bouche est citronnée et liquoreuse, et possède un équilibre sucre/acide remarquable. La fin de bouche est interminable. Et si les plus grands liquoreux du monde étaient les rieslings ? (Excellent, voire plus).


Cette première journée fut longue et instructive. Les palais sont un peu fatigués mais pas du tout épuisés.


Thierry Meyer