L'Oenothèque Alsace

OENOALSACE.COM

Rêve d’une nuit d’été

Rêve d’une nuit d’été
Dîner à Strasbourg – 16 Juillet 2005


Le dernier dîner Strasbourgeois a permis de réunir une belle brochette de flacons, que la chaleur de l’été n’a pas éclipsé, bien au contraire. Les six convives ont pris le temps de goûter chaque vin à l’aveugle avant de l’apprécier sur une sélection de plats simples.



Pour se mettre en bouche, 4 vins blancs secs à l’aveugle


Riesling Bio 2003 – Domaine de l’Ancien Monastère : Le nez est frais, muscaté, mentholé avec de petites notes de fermentation et de grillé qui rappellent discrètement le millésime. La bouche est fraîche avec une bonne acidité, et donne une belle impression de richesse et de minéralité. La fin de bouche possède un petit quelque chose d’étrange, un peu végétal, mais n’occulte pas la très bonne impression que donne ce vin dans un millésime difficile. On hésite quand même entre 2002, 2003 et 2004. A 5 euros, super rapport QP bien entendu. Très Bien.


Riesling Wormeldange Koeppchen 2000 – Alice Hartmann (Luxembourg) : Un domaine qui remonte la pente dans un millésime mûr, voilà de quoi avoir un avis intéressant. Le nez est parfumé, avec des notes de fleurs blanches, d’anis et de miel. La bouche est ample, mûre, sèche avec une bonne acidité. On sent un léger moelleux qui confirme la maturité du raisin sans altérer le coté sec du vin. Tout cela fait penser un riesling du GC Kastelberg  comme on en trouve chez Remy Gresser. Une très bouteille qui montre un potentiel évident sur quelques parcelles sélectionnées au Grand Duché. Comme le vin est probablement vendu moins de 10 euros, une très bonne affaire également. Excellent


Riesling Grand Cru Wineck-Schlossberg 2000 – Vincent Spannagel : pour faire le pendant avec un vin luxembourgeois, rien de tel qu’un vin médaillé d’Or au concours Rieslings du Monde 2002. La robe est un peu plus foncée que le précédent, mais reste claire avec beaucoup d’éclat. Le nez est parfumé, floral (lilas, muguet), églantine, miel, dans un style délicat et mur. A l’aération des notes d’agrumes viennent de greffer sur le bouquet floral. La bouche est riche, souple et élégante, avec beaucoup de gras, une acidité présente sans être l’artère du vin. Une légère évolution se sent en fin de bouche sur ce vin qui représente bien son Grand Cru. Très Bien.


Pinot Gris Cuvée des Comtes d’Eguisheim 1989 – Léon Beyer : la robe est jaune légèrement doré, avec un disque épais. Le nez est parfumé et complexe, avec des parfums de truffe, de pralin, de fruits jaunes, avec du miel et des agrumes confits à l’aération. La bouche est très fine grâce à une acidité assez présente du début à la fin, qui équilibre une matière dense et riche, donnant un équilibre presque sec à ce vin qui comporte un peu de sucre résiduel. La minéralité est assez forte en bouche et avec les arômes d’écorce d’orange, rappellent que le GC Eichberg n’est pas très loin, même s’il n’est pas revendiqué sur l’étiquette. On ne dirait pas avoir affaire à un vin de 16 ans d’âge, le vin vieillit très bien et n’a pas pris une ride depuis la dernière dégustation il y a 5 ans de cela. Très Bien.


En Apéritif, un cake aux deux olives va nous caler l’estomac après la dégustation

Champagne Salon 1988 : la robe est jaune paille assez foncée, avec une bulle très fine qui forme un cordon bien faible et peu persistant. Le nez est fin, sur des arômes de fruits secs et de grillé. La bouche est fine et effervescente, tendue grâce à une acidité très présente et beaucoup de densité. Malheureusement un goût prononcé de bouchon vient gâcher ce qui avait pourtant bien commencé. Dommage.


Champagne Bollinger Grande Année 1990 : Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, pour remplacer ce Salon bouchonné nous ouvrons un vin plus classique, une valeur sûre.  La robe est jaune paille légèrement doré, avec des bulles vivaces et un cordon qui se tient bien. Le nez est parfumé, riche, avec du biscuit, de la brioche, des fruits rouges et des notes de noisette fraîche. La bouche est riche et grasse, ronde avec un bel équilibre entre le gras et la nervosité. L’impression sur la langue est très agréable, et la finale est très complexe, appelant rapidement une autre gorgée… Dégusté régulièrement depuis 1998, voilà une cuvée qui vieillit admirablement bien. Vivement la comparaison côte à côte avec un RD90 Très Bien


Filet de Perche du Nil  à la coriandre, risotto au parmesan

Un plat simple pour accompagner ces deux grands blancs dans des millésimes délicats.


Corton Charlemagne 1987 – Bonneau du Martray : La robe est jaune citron assez foncé. Le nez est très parfumé, beurré avec des notes de coquille d’huître qui font un peu penser à un Savennières. Le vin est mûr et légèrement évolué. La bouche est sèche, dense et grasse, avec un coté beurre salé et caramel très présent en bouche. L’acidité est bonne et garde de la structure au vin. Un petit millésime qui révèle le cru malgré un léger déséquilibre. Un vin à boire mais qui restera au top encore quelques années. Très Bien


Riesling Clos Ste Hune 1992 – Trimbach : la robe est jaune beurre, assez dense. Le nez est intense,  marqué par des notes d’hydrocarbure inhabituelles sur le Clos Ste Hune, le millésime 1991 à part. On repart ensuit sur des arômes de naphte et de fleurs séchées. La bouche est dense et grasse, typée Ste Hune avec ce gras et cette acidité fondue qui donne beaucoup de puissance tout en restant sur un équilibre sec, loin de la tension sucre/acide qu’on trouve dans d’autres vins. Beaucoup de pureté dans ce vin qu reste à maturité malgré des notes d’évolution perceptibles dans la longue finale. Très Bien


Chantilly de foie gras au miel en toastinettes

Petit interlude de dégustation, avec en accompagnement des petites bouchées à la chantilly de foie gras sur des rondelles de pain grillé au sésame. L’idée est de comparer le style respectif de deux grands liquoreux arrivés à maturité.


Vouvray Moelleux Clos du Bourg 1ere Trie 1971 – Domaine Huet : La bouteille est massive, style Bourguignon avec un culot très profond et un goulot épais. La robe est jeune doré très foncé, tirant sur l’ambre et le cuivre, tout en gardant un très bel éclat. Le nez est très parfumé, avec des notes de pain grillé, de kumquat, d’orange amère et de miel, dans un style très botrytisé. La bouche est fine, liquoreuse tout en paraissant aérienne grâce à la fine acidité très présente. L’ensemble est très fin, à parfaite maturité sans aucune trace de vieillissement prématuré, et donne un vin probablement voué à une très longue garde supplémentaire. Deux jours plus tard, le fond de bouteille ne montre aucune trace de fatigue, le vin se boit toujours aussi bien. Excellent, voire plus


Riesling Sélection de Grains Nobles 1976 – Hugel et Fils : Que peut-on ajouter qui n’ait déjà été dit sur cette cuvée ? Le nez est beurré, complexe avec des notes fumées, de l’anis et du miel, devenant plus complexe à mesure que le vin se réchauffe. La bouche est grasse, avec un moelleux fondu qui laisse la place à la minéralité du terroir, dans un style vraiment propre à cette bouteille. Certains convives reconnaissent le vin à l’aveugle, sans aucune hésitation. Un vin hors norme, loin du déclin, véritable porte-drapeau des vins moelleux de garde sur les grands terroirs de la région. Les meilleurs rieslings SGN alsaciens de 1989, 1990, 1998, 2000, 2001 et 2002 méritent vraiment d’être conservés 30 ans. Excellent, voire beaucoup plus.


Pain de veau aux 4 épices, flan de courgettes

Un plat facile à faire et parfumer va accompagner  un duo de vins rouges très prometteur.


Volnay 1er Cru Les Champans 1990 – Joseph Voillot : La robe est rouge dense, assez brillante, avec de belles jambes. Le nez est fruité, avec de la cerise, des fruits des bois, et une touche de coquille d’huître. La bouche est souple, concentrée, avec des tanins gras assez discrets. La fin de bouche est longue et élégante. Un vin en début de carrière qui se présente bien mais ne suscite pas la même émotion que l’an dernier. Les blancs qui ont précédé ont placé la barre très haute. Très Bien


Grands Echezeaux 1990 – Drouhin : La robe est un peu plus foncée, sur des nuances rouge-noir. Le nez est racé, fumé avec des notes de sous-bois, de cassis et de ronce. On sent un boisé très fondu qui a du être assez présent dans la jeunesse du vin. On est bien sur la Côte de Nuits ! La bouche est dense et sèche, moyennement corsée, avec une belle acidité et un coté très épicé en finale. Un vin à maturité qui peut encore se bonifier dans les 10 ans à venir. Le style tranche avec le vin précédent, mais de nouveau la grande émotion tarde à venir. Très Bien


Les Fromages affinés vont nous permettre de revenir sur les blancs moelleux, et de constater que le roquefort s’accommode bien du Vouvray 71 à cause du lien avec le botrytis du vin, et que le comté relève particulièrement bien le goût du riesling SGN 76.


Soupe de mangue à la vanille

Pour terminer en beauté et adoucir le dessert aux saveurs exotiques, un essai de deux vins complètement opposés.


Niagara Riesling Icewine 2001 – Inniskillin : La robe est pâle, avec un disque épais. Le nez est parfumé, très pur avec des notes de citron confit. La bouche est liquoreuse avec une forte acidité qui donne beaucoup de tension, puis on reste dans un équilibre à la fois pur et citronnée, avec des fruits exotiques en fin de bouche. Un vin de glace droit et variétal à boire maintenant, qui passe très bien à table. Très Bien


Gewurztraminer Grand Cru Wineck-Schlossberg SGN 2001 – Vincent Spannagel : La robe est jaune citron foncée. Le nez est fruité, sur des arômes d’agrumes confits, avec des notes florales (rose, fleur d’églantier) rappelant un peu le style variétal des gewurztraminers VT du domaine Weinbach. La bouche est grasse, ronde et moelleuse, avec un joli fondu des arômes. La fin de bouche est très longue. Le vin possède une toute autre complexité que le riesling vin de glace, mais la comparaison lui est peu favorable car le riesling écrase le gewurztraminer par son sucre et son acidité. Ce vin est un futur très grand vin, pour qui saura l’attendre. Excellent.


Un bien beau dîner avec un nombre de flacons somme toutes assez limité. Une douzaine de bouteille semble convenir à la plupart des amateurs de vin.


Thierry Meyer