Dîner autour dun cuissot de chevreuil
9 janvier 2005
Dîner autour dun cuissot de chevreuil… qui avait été chassé en décembre dernier dans les plaines brumeuses de l’Alsace ! Dîner chez un ami amateur de vin autant que fin cuisiner samedi dernier, histoire de bien commencer lannée. Les vins sont dégustés à laveugle.
En entrée, mousse de poireaux, crème parmentière et caviar avec une tuile au fromage
VDP de lHérault blanc 2000 – La Grange des Pères : Il ne sagit pas dun vin de missionnaires, mais de la version chardonnay du grand rouge du sud. Le nez est élégant, fin et assez complexe, sur des notes de beurre et de noisette, sans oublier de lanis et des herbes fraîches qui font penser un instant à une Marsanne plus quun à un chardonnay. La bouche est fine et grasse, acidulée dans un style qui fait penser à un Chassagne Montrachet 1996. Léquilibre est remarquable et en cherchant lorigine possible du vin on ne peut sempêcher de penser à un meursault issu de terres froides ou à un Grand Cru de la Côte de Beaune dans une année un peu sèche. Très Bien
Riesling Grand Cru Rangen Clos Saint Urbain 1990 Zind-Humbrecht : en comparaison avec le chardonnay, le nez explose littéralement de pétrole au point quon se croit dans une pompe à essence. Le nez est fortement pétrolé et légèrement réglissé, un peu comme dans certains crus fortement calcaires sur des rieslings de 15-20 ans dâge (un Saering 85 de Schlumberger ?). La bouche tranche nettement en revanche avec lattente crée par le nez : le vin se fait très très fin, avec une forte concentration, un léger moelleux très fondu et une grosse matière, A laération les notes fumées et un peu iodées apparaissent en milieu de bouche. Un vin énorme, à carafer pour en profiter pleinement. Superbe accord avec les notes iodées du caviar. Excellent.
Sur le cuissot de chevreuil rôti, choux rouge, pommes boulangères, échalotes et endives braisées
Bandol 1990 Château de Pibarnon : La robe est sombre, couleur café, avec des traces dévolution sur les bords. Le nez est parfumé, sur du pruneau, de la prunelle, avec des notes chocolatées. La bouche est très fine, concentrée et sèche, qui pourrait faire penser à un grand bordeaux si les arômes névoquaient pas plus un vin du Languedoc. Je pense à une Muntada 98, et je suis loin du compte. Le vin paraît beaucoup plus jeune quil nest, et possède encore un fort potentiel de garde. Très Bien
Châteauneuf du Pape 1989 Château de Beaucastel. La comparaison avec le Bandol est troublante. Le premier nez est légèrement réduit avec des notes animales qui ne me plaisent pas. La bouche est également moins corsée que le vin précédent, légèrement épicée, amis sans beaucoup de concentration. La première impression est un « Bof » très net, et il faudra attendre deux heures que le vin saère pour avoir un profil différent. Le vin devient très fruité, les notes animales sestompent, et la bouche devient plus pure. Jai souvent cette difficulté à goûter Beaucastel lorsquil nest pas carafé. Bien
Saint-Emilion 1998 Virginie de Valandraud : Le style est tout de suite plus jeune sur ce vin cette fois. Les notes violacées complètent la robe sombre et opaque. Le nez est marqué par des arômes de poivron rouge qui font penser à un vin de cabernet franc. La bouche est fraîche et concentrée, assez fine mais avec des tanins un peu sensibles. Je suis surpris par lorigine du vin, et mattendais à plus pour cette étiquette. Bien.
Pauillac 1988 Château Mouton-Rothschild : Autre découverte à laveugle. Le nez est assez discret, légèrement épicé avec des notes de cuir. La bouche est sèche, dense et assez corsée, avec des notes de mine de crayon qui apparaissent en fin de bouche. Pas le blockbuster au nez, et en bouche lensemble est encore un peu serré. Bien
Sur le fromage
Chambertin Clos de Bèze 1992 Bruno Clair. Changement de style. La robe se fait plus rubis, brillante. Le nez est parfumé, sur la cerise rouge avec des notes fumées. La bouche est une caresse, tendre à souhait, avec des tanins fondus et des fruits rouges qui tapissent la langue. En venant après deux bordeaux le terroir ne sort pas très bien, on remarque surtout la douceur du fruit. Mais le vin a une finesse et une jeunesse remarquable, surtout pour un 1992. Très Bien.
Saint-Julien 1964 Château Léoville Las Cases. Servi cote à cote avec le Bourgogne, lorigine Bordelaise est apparente avec des notes de fruits rouges sans équivoque. La robe est à peine plus foncée et plus rouge que le Bourgogne. En bouche le fondu est incroyable, la fraîcheur du fruité rehaussée par quelques notes de champignon, de fleurs séchées et de cuir donnent une bonne complexité aromatique. Le fondu des tanins et de lacidité dans un mélange fruité et assez gras, léquilibre moyennement corsé et doux donne une impression intemporelle. Je suggère un Saint Julien 83, Leoville Poyferré peut-être ? Ce 1964 est extraordinaire, cest LE vin de la soirée. Excellent, voire plus.
Sur la soupe de fruits exotiques
Riesling Grand Cru Schlossberg Quintessence de Grains Nobles Cuvée dOr 1989 Domaine Weinbach. Un vin de couleur vieil or, au disque très épais. Le nez est marqué par du miel, du pralin et des épices à la façon dun pinot Gris SGN. La bouche est riche, liquoreuse, avec beaucoup de fruits confits. Le cépage sefface devant la surmaturité, et ne montre pas ses arômes. Jai le souvenir du Riesling Schlossberg Sainte Catherine 1995 sec, qui montrait également de surprenants notes épicées masquant un peu le cépage. La finale est longue (on a le temps de lire le nom du vin plusieurs fois !) mais reste sur la surmaturité. Un vin à attendre encore 5-10 ans pour découvrir tout son potentiel. Excellent.
Soirée exceptionnelle où les vins et les plats se sont montrés dignes des plus belles tables
Thierry Meyer