L'Oenothèque Alsace

OENOALSACE.COM

Bilan 2017 – Quelques quilles au top dans le gosier

La fin de l’année est l’occasion de se retourner sur les notes de dégustation prises de mois en mois, et en se focalisant sur les vins dont on se souvient (notés Excellent), on peut retrouver quelques tendances à analyser:

  • L’Alsace des grands terroir se déguste à maturité
  • Le Rhône Nord toujours au top en rouge
  • La grande Bourgogne rouge se distingue par son fruit
  • Les autres régions se découvrent au hasard des dégustations et des rencontres

 

L’Alsace des grands terroir se déguste à maturité

Si la majorité des vins des appellations Grand Cru sont certainement à boire avant 7 ans d’âge, les meilleures cuvées se montrent souvent le plus équilibrées entre 10 et 20 ans, lorsque la patine du temps apporte une complexité aromatique et une bonne intégration du gras et de l’acidité. On retrouve alors des vins parfaits à table, dont le caractère en bouche est fortement influencé par le lieu d’origine. 2018 sera-t-elle enfin l’année de l’émergence des grands vins d’Alsace sur la scène mondiale ? on peut cette année encore le souhaiter…

Riesling Grand Cru Osterberg 2008 – Louis Sipp : un Osterberg bien né qui arrive doucement à maturité. La robe est jaune or avec de l’éclat. Le nez est parfumé, intense, fumé avec des notes d’hydrocarbure mêlées d’agrumes murs et une pointe d’écorce d’agrumes. La bouche est sèche en attaque, puis dense, acidulée avec une légère amertume, évoluant sur cette belle ossature acide de l’Osterberg, sans fléchir jusque dans la longue finale marquée par une légère amertume. Un vin riche et dense, parfait à table, carré de porc et ris de veau de lui font pas peur. 

Riesling Grand Cru Saering 2002 – Domaines Schlumberger : un vin équilibré à maturité. Parfaitement bouché avec un bon bouchon et une rondelle de cire sous la capsule, le vin présente une belle patine. La robe est jaune or brillante, le nez est complexe, ouvert, avec des arômes de fleurs blanches, de pamplemousse, de beurre,  une pointe d’hydrocarbure et des notes d’écorce d’agrume à l’aération. La bouche est ample en attaque, d’équilibre sec avec du gras, une acidité fine et ciselée. De moyenne puissance, la mariage du grès et du calcaire  donne un équilibre délicat. Longue finale avec des amers présents. Un vin à maturité, qui a passé sa phase de prime jeunesse pour entrer en phase secondaire avec une très belle complexité. A boire sur un poisson de rivière voire des langoustines. 

Riesling Grand Cru Brand 2000 – Zind-Humbrecht : un grand Brand de style demi-sec. La robe est dorée, le nez envoûtant, complexe, marqué par le miel, la vanille, les fruits jaunes, patiné par le temps. La bouche est douce en attaque, puis ample, pure avec du gras, sur un équilibre charnu et frais. Le millésime 2000 a donné une vendange tardive à l’ancienne, remarquable dans son équilibre. Un grand Brand. 

Riesling Kappelweg 1998 – Rolly-Gassmann : un grand vin de terroir qui arrive à maturité. La bouteille est en parfaite condition avec un beau bouchon. La robe de couleur or est brillante. Le nez est intense, complexe, très mûr avec des arômes de miel, de fumée, d’épices douces et une pointe d’agrumes confits. La bouche est ample en attaque, légèrement douce mais rapidement d’équilibre plus sec avec une belle acidité. Le milieu de bouche est frais et dense avec du gras, comme souvent sur un terroir de marnes calcaires. La fin de bouche est longue et trace avec puissance sur la langue. La récolte à forte maturité est ici garante d’une belle acidité constitutive exprimant l’origine plus que le raisin pas mur, et à bientôt vingt ans d’âge ce vin atteint une plénitude exceptionnelle. On le gardera encore 20 ans en cave si besoin, mais ce sera dur de résister. A l’instar de Bordeaux, le millésime 1998 se montre souvent magnifique en ce moment en Alsace. Sur un assortiment de sushis, ce fut un compagnon idéal d’une soirée gourmande.

Riesling Grand Cru Kastelberg Sélection de Grains Nobles 2001 – Domaine Wach : un grand vin à maturité. La robe est brillante, dorée. Le nez est parfumé, complexe, avec des arômes de safran, de miel et d’agrumes confits. La bouche est précise, moelleuse et finement acidulée en attaque puis dense avec une sensation tannique. La finale est fraîche, longue et complexe. 2001 est décidément le premier grand millésime du 21e siècle, et il tiendra à la garde jusqu’à ma retraite au moins. 

Gewurztraminer Grand Cru Mambourg Vendange Tardive 1997 – Marc Tempé : un grand Mambourg. La robe est brillante, vieil or foncé, avec de l’éclat. Le nez est ouvert, intense et complexe, sur les épices brunes, la muscade, la coriandre, évoluant sur les fruits jaunes, la cannelle, avec une pointe de vanille et de caramel. La bouche est riche en attaque, moelleuse et profonde, montrant rapidement une belle acidité qui tire la finale en longueur. Beau retour en bouche sur le clou de girofle. Le moelleux est parfaitement intégré, et la sensation de puissance portée par les épices et l’acidité apporte un caractère racé à l’équilibre. Un grand Mambourg désormais à maturité, à essayer à table sur une cuisine riche. 

Le Rhône Nord toujours au top en rouge

Grand cuvée sur petit millésime ou grand millésime à maturité, la syrah rhodanienne  continue de me séduire par sa capacité à encaisser le soleil et les fortes chaleurs, et à produire des vins racés aussi bien à l’aise sur les viandes grillées que les ragoûts.

Côte Rôtie La Landonne 2008 – E. Guigal : un grand vin à l’équilibre austère. La robe est dense, sombre, brillante. Le nez est épicé, fumé avec une note de poivre frais qui prend de l’intensité à l’aération. La bouche est ample en attaque,  dense avec des tanins fins bien présents, présentant une belle concentration avec une note de suie qui accompagne la longue finale. Le style droit et austère de la Landonne le rapproche toujours d’un vin du Médoc, et dans le millésime 2008 assez frais le caractère poivré est amplifié, donnant au vin des airs de mondeuse. La finesse des tanins et la pureté de la bouche rappellent que cette cuvée est véritablement la main de fer dans le gant de velours. 

Côte Rôtie Château d’Ampuis 2003 – E. Guigal : un dandy élégant, contre toute attente. La robe est dense et foncée. Le vin se montre civilisé avec des arômes de fruits noirs qui restent frais, une jolie pointe d’olive et des notes fumées. La bouche est pure en attaque, dense et très fine avec des tanins gras et très fins parfaitement intégrés. Très loin de l’attente d’une syrah ventripotente et alcooleuse qu’on pourrait attendre en 2003, le Château d’Ampuis se rapproche des LaLaLas en 2003 en proposant un équilibre tout en finesse et élégance. La longue finale possède de la sapidité. Un tour de force. 

Hermitage Les Greffières 1985 – Domaine de Vallouit : Grande année pour une grande cuvée. La robe est profonde, rouge sang avec des bords tuilés, conservant une belle brillance. Le nez est ouvert, lardé, fumé, avec des notes de petits fruits noirs, évoluant sur un caractère poivré. La bouche est franche en attaque, dense et pure avec des tanins gras bien fondus, et surtout une acidité qui apporte une belle fraîcheur et une jeunesse incomparable pour ce beau trentenaire. Un grand vin à maturité, du niveau du très bon 1990 dégusté il y a quelques années, qui vieillira encore dans la cave du chanceux qui en a encore. 

La grande Bourgogne rouge se distingue par son fruit

Au rythme des investissements locaux et étrangers, les appellations font exploser les prix, et pour trouver grand à prix sage il faut chercher la vinification qui respecte le fruit ou aller sur des millésimes anciens souvent plus abordables que les plus récents. 1999 arrive à maturité en attendant les 2005, mais la suite des achats post 2012 est dans l’inconnu pour ma cave.

Chambertin 2009 – Rossignol-Trapet : un grand vin puisant et équilibré. La robe est moyennement dense avec des nuances tuilées qui apparaissent. Le nez est parfumé, complexe, mélange de fleurs, d’épices, de fumée, avec une note de mûre à l’aération. La bouche est ample en attaque, puissante avec des tanins gras et fins bien intégrés qui donnent une sensation veloutée. L’ensemble est riche avec une longue finale sur les épices. Déjà très approchable. 

Nuits Saint-Georges 1er Cru Les Pruliers 1999 – Lucien Boillot : un très grand Bourgogne à maturité. La robe est dense, rubis avec des bords légèrement tuilés. Le nez est intense, complexe, marqué par la ronce, la fumée, la pivoine et la rose fanée avec une touche discrète de petits fruits rouges et de mûre qui se développe après aération. La bouche impressionne par son équilibre et sa densité. Souple en attaque, encore jeune, puis dense et presque sévère avec une acidité bien présente qui relève des tanins fins, avant que la chair et le fruit reviennent en force, dominé par la groseille et la mûre. Une telle combinaison de fruit, de chair et de complexité est remarquable, et la finale très longue confirme son origine, ainsi que le grand millésime. On ne peut que craquer pour un Bourgogne à ce niveau-là. Une cuvée heureusement peu connue des amateurs d’étiquettes bourguignonne, très régulière d’un millésime à l’autre. La source de ce bel achat se reconnaîtra et se retrouve encore une fois chaleureusement remerciée de l’opportunité. 

Pommard 1er Cru Rugiens 1999 – Domaine Michel Gaunoux : un grand Rugiens, d’une grande jeunesse. La robe est dense, rouge-noir avec une belle brillance. Le nez s’ouvre à l’aération sur des arômes de violette, de mûre fraîche, d’écorce d’orange avec une pointe fumée. La bouche est corsée en attaque, dense et légèrement tannique avec un caractère charnu qui fait ressortir les petits fruits noirs, évoluant en finale sur une légère amertume. Un vin ample et racé, encore très jeune avec un fruit bien présent, déjà délicieux mais taillé pour un grande garde. 1999 est vraiment grand en Côte de Beaune rouge. Excellent

Les autres régions se découvrent au hasard des dégustations et des rencontres

Impossible de déguster des millions de cuvées, mais deux régions font encore mon bonheur. La Champagne qui continue de se distinguer des crémants d’Alsace ordinaires lorsque le terroir est grand et que les élevages sur latte sont longs, et le Jura en plein dépoussiérage, qui connait une notoriété en hausse depuis que les exportations de vin jaune ont repris aux Etats Unis. la Jura est probablement la région de France à suivre, tant la potentiel de ses terroirs de marnes est important.

Champagne Cuvée William Deutz 2002 – Deutz :  un champagne vineux à souhait. La robe est cristalline avec un cordon fin et persistant. Le nez est parfumé, complexe et patiné, avec des arômes de fruits sec, de noisette, de fleurs séchées avec une pointe de miel. La bouche est ample, concentrée et vineuse en attaque, puis charnue et avec une bulle fine rehaussée par une acidité franche qui donne de la légèreté à l’ensemble. Longue finale présentant une légère amertume. Tant qu’à boire du Champagne, autant boire du grand ! De cuvée en cuvée 2002 confirme sa grande qualité.

Côtes du Jura Chardonnay Les Champs Rouges 2014 – Domaine Labet : un grand vin très attachant. Si les expérimentations de Julien Labet ont parfois donné des résultats très variables, ces dernières années la régularité est au rendez-vous, et les vins ont gagné en pureté et en salinité. Cette cuvée de chardonnay ouillé très faiblement soufré possède une très belle maturité, avec une robe dorée brillante. Le nez est mur, intense avec des arômes d’agrumes, de fleurs blanches, de petits fruits acidulés façon groseille, et une pointe de réduction façon sésame grillée. La bouche est franche et intense en attaque, très saline avec une belle densité. L’équilibre minéral est magnifique, renforcé par l’acidité du millésime. Une grande réussite qui continue de pousser haut la qualité des grands vins du Jura. 

 

 

Bonne Année 2018 !