L'Oenothèque Alsace

OENOALSACE.COM

Les terroirs alsaciens révélés par le riesling

19 septembre 2006 – De nombreux amateurs se demandent comment appréhender les terroirs alsaciens et faire la part des choses entre le terroir, style de vinification, le cépage et les millésimes. La dégustation structurée autour du cépage riesling, avec des paires de vins de même millésime était une bonne approche pour appréhender les variations d’arômes et de salinité que donnent les différentes natures de sol. Granitiques, calcaires ou volcaniques, la découverte des terroirs alsaciens s’est faite en 16 rieslings du Nord au Sud de la région, de 2004 à 1979. Lire les appréciations combinées de 15 participants (accès public).

Chaque série de vin était servie en une seule fois, à l’aveugle, permettant à chaque participant de déguster les vins en une seule fois. S’en suivait une discussion sur les qualités et les caractéristiques de chaque vin. Les tarifs des vins départ cave sont indiqués pour information, lorsque ceux-ci étaient disponibles.

Première série : deux rieslings variétaux sur sol léger, légère évolution variétale

La première série permet d’appréhender les caractéristiques du cépage riesling, avec des vins produits sur des sols légers. Arômes d’agrume et de fumée, bouche fraîche, acidulée et saline caractérisent le cépage. Effet de l’ordre de la dégustation, la première paire est notée assez basse par les participants qui s’attendent à une qualité croissante dans cette dégustation à l’aveugle.

Riesling 2000 – Beck-Hartweg (4.7€, sables granitiques): Le nez est parfumé, un peu évolué avec des arômes de frangipane, d’anis et de mie de pain. La bouche est franche en attaque, sèche et aérienne, avec une évolution plus fraîche grâce à une acidité mure qui charpente bien la bouche. La finale est sèche et légèrement amère des arômes de poivre blanc. Un riesling à maturité pour les amateurs du style des rieslings de la région de Dambach, qu’on retrouve bien dans cette bouteille. Bien
Avis du Groupe : Excellent-0 Très Bien-0 Bien-4 Bof-11 Beurk-0

Riesling 2000 – François Bléger (5.5€, sol argilo-limoneux) : La robe est or pâle avec des reflets verts. Le premier nez est discret, sur des agrumes, évoluant sur des notes de citronnelle et de maggy. La bouche est franche en attaque, puis sèche et grasse avec une belle minéralité qui rappelle le caillou et qui assèche la langue. Le vin est riche et mûr, finement acidulé avec une finale assez courte sur les agrumes. Un riesling à la fois frais et minéral. Bien
Avis du Groupe : Excellent-0 Très Bien-0 Bien-5 Bof-10 Beurk-0

Deuxième série : deux rieslings d’élevages différents

La comparaison de deux riesling de terroir et millésime similaire, mais récoltés et élevés de manière très différentes permet de constater des différences entre les vins qui n’ont rien du terroir. Entouré de deux vins légers à l’acidité salée, le vin de Laurent Barth apparaît trop riche pour un riesling. Sa fermentation malolactique a retiré le caractère asséchant de l’acide malique des deux autres, et sa concentration et son gras le distinguent au point de paraître lourd.

Riesling Rebgarten 2004 – Bestheim (6.25€, sables granitiques): le premier nez est fruité mais un peu terne, prenant de l’intensité à l’aération avec des aromes de fleurs et de fumée. La bouche est grasse en attaque, puis développe une matière salée et acidulée avant de revenir sur des notes plus végétales en finale. Le vin possède un équilibre sec et épicé sans être liégeux, mais qui fait penser à une altération due au bouchon. Bof
Avis du Groupe : Excellent-0 Très Bien-0 Bien-7 Bof-8 Beurk-0

Riesling Rebgarten 2004 – Laurent Barth (8€, sables granitiques): La robe est jaune pâle, brillante. Le nez est fruité, avec des arômes d’agrumes mûrs, d’abricot et un coté végétal un peu sauvage typique de certains sols granitiques. La bouche est grasse, souple et concentrée, avec un coté crayeux sur la langue. L’acidité reste assez élevée sans être gênante, et la longue fin de bouche reprend les arômes du nez. Un vin sec (5g/l de sucre résiduel) qui a fait sa fermentation malolactique, remarquable de concentration et d’équilibre, mais qui parait sucré en comparaison du précédent. Bien
Avis du Groupe : Excellent-0 Très Bien-1 Bien-5 Bof-7 Beurk-2

Riesling Rebgarten 2004 – Bestheim (4.95€ en supermarché, sables granitiques) : La deuxième bouteille d’une autre origine confirme le probable défaut de la première, à moins qu’il s’agisse d’une mise différente. Le premier nez est intense, fruité avec des arômes d’agrumes et de fruits acidulés et de pomme verte. La bouche est fraîche en attaque, puis développe une matière acidulée et saline qui tire la finale en longueur. Le vin possède un équilibre agréable à boire maintenant, la matière supportant bien la vivacité du vin que donne l’acide malique du millésime 2004. Très Bien
Avis du Groupe : Excellent-0 Très Bien-2 Bien-11 Bof-2 Beurk-0

Troisième série : le grès et le volcan, qui façonne le riesling

Après 5 rieslings de terroirs simples et légers, les deux vins de tendance volcanique vont permettre d’aborder les grands crus avec des expressions aromatiques typées. Les deux vins proposent des notes fumées très marquées au nez qui tranchent nettement avec les vins goûtés précédemment.  Préférence du groupe pour le Kitterlé, d’une concentration plus forte que le Muenchberg.

Riesling Grand Cru Muenchberg 2001 – Wolfberger (8.6€, gréso-volcanique caillouteux) : Le nez est sauvage, minéral et fumé, avec un léger coté oxydatif. La bouche est sèche, assez dense, minérale, mais reste assez légère. La finale est sèche et épicée. Un vin marqué par le feu du volcan, dans un style léger facile d’accès. Bien
Avis du Groupe : Excellent-0 Très Bien-4 Bien-5 Bof-5 Beurk-1

Riesling Grand Cru Kitterlé 2001 – Domaines Schlumberger  (18€, gréso-volcanique): La robe est jaune beurre éclatante, avec un disque épais. Le nez est parfumé, minéral pierreux avec des notes florales, puis des notes fruitées (pêche blanche, poire). La bouche est grasse, assez sèche avec une acidité fine et tranchante un peu masquée par la grosse matière du vin. Un vin mur, puissant et concentré, sans concession sur son terroir. Très Bien.
Avis du Groupe : Excellent-1 Très Bien-7 Bien-7 Bof-0 Beurk-0

Quatrième série : La salinité des terroirs marno-calcaro-gréseux

Après le terroir au nez, on peut enfin s’attaquer à la salinité en bouche, véritable expression des sels minéraux capturés par le vin au travers de ses racines. Plus fin et plus consensuel, le Zotzenberg plait par sa délicatesse, alors que le vigoureux étalon Hengst suggère que les grands terroirs au goût prononcé ne plaisent pas à tout le monde.

Riesling Grand Cru Zotzenberg 2002 – Emile Boeckel (Marno-calcaire): Le nez est discret, iodé, et marqué par des arômes d’agrumes et de fruits mûrs. L’attaque en bouche est grasse, puis sèche avec une acidité fine qui apparaît brièvement, donnant  un équilibre salé à la bouche. Un riesling en finesse. Bien
Avis du Groupe : Excellent-2 Très Bien-7 Bien-5 Bof-1 Beurk-0

Riesling Grand Cru Hengst 2002 – Josmeyer (25.5€ , Marno-calcaro-gréseux): le premier nez est d’intensité moyenne, fumé avec des arômes de fruits acidulés, évoluant à l’aération sur des notes minérales et des arômes de rhubarbe. La bouche est grasse en attaque, puis minérale et sèche, gagnant en puissance avec une acidité qui apparaît progressivement. Le vin se montre droit, grand et très pur. La finale est longue, tendue par l’acidité et soutenu par des arômes persistants de citron. Du grand riesling à l’aube de sa longue carrière, et surtout une expression ciselée du Hengst. Excellent.
Avis du Groupe : Excellent-3 Très Bien-2 Bien-9 Bof-1 Beurk-0

Cinquième série : Granit et calcaire, profondeur du terroir et finesse

Après une première approche de la salinité des vins de terroir, la grande différence entre granit et calcaire a permis de faire apparaître une grande différence dans la structure de l’acidité des deux types de terrain. L’acidité du Clos Hauserer état plus longue et plus ample que celle plu immédiate et légère du Schlossberg. A noter la belle réussite du Schlossberg de la cave de Kientzheim.

Riesling Grand Cru Schlossberg 2004 – Albert Mann (18.5€, granitique) : Le nez est moyennement intense, net et très fin, avec des arômes de fleurs et d’agrumes. La bouche est grasse en attaque, très minérale, avec une bonne densité et beaucoup de pureté, évoluant sur un équilibre très gras soutenu par une acidité fine et fondue. La finale est longue, saline avec un léger moelleux. Un vin déjà ouvert encore marqué au nez par le coté floral des jeunes Schlossberg. Très Bien
Avis du Groupe : Excellent-0 Très Bien-5 Bien-9 Bof-1 Beurk-0

Riesling Clos Häuserer 2004 – Zind-Humbrecht (30.8€, indice 1, Marnes calcaires de l’oligocène. Coluvium de pente. Exposé est. Très faible pente.) : Le nez est très fruité, pur avec des arômes d’agrumes mûres – citron doux. La bouche est sèche en attaque, assez vive et encore un peu marquée par le gaz carbonique, évoluant sur un équilibre minéral très puissant. L’acidité est moins marquée dans la longue finale. Un vin très puissant qui réunit une bonne maturité et une bonne vivacité, qui sera de grande garde. Très Bien
Avis du Groupe : Excellent-1 Très Bien-8 Bien-6 Bof-0 Beurk-0

Riesling Grand Cru Schlossberg 2004 – Cave de Kientzheim (7€, granitique): Le nez est discret avec des notes florales. La bouche est fraîche en attaque, minérale avec beaucoup de pureté. La fin de bouche est asse courte, fruitée et délicate. Un vin léger et cristallin, doté d’un bel équilibre qui le rend très plaisant dès à présent.
Avis du Groupe : Excellent-2 Très Bien-5 Bien-7 Bof-0 Beurk-0

Sixième série : l'évolution et le terroir sur un vieux millésime

Si la minéralité est parfois perceptible au niveau aromatique, comme le caractère fumé des terroirs volcaniques, il s’agit surtout d’une impression saline en bouche. La dégustation de vieux millésimes aux bouquets complexes va permettre de confirmer la différence entre terroirs, avec une paire de vin u même producteur. Si le nez du Grand Cru est plus veux du fait d’un vieillissement plus avancé, la profondeur et la minéralité gustative de ce dernier ne laisse pas de doute, et une majorité de participants retrouvent le grand cru dans la paire. Les notes reflètent également l’accoutumance et le goût des participants pour les vieux rieslings.

Riesling Altenberg de Bergheim 1979 – Gustave Lorentz (marno-calcaire): Initialement discret, le nez devient rapidement expressif, mentholé et fumé. La bouche est dense et vive en attaque, puis se présente avec du gras et de la profondeur, autour d’une acidité mure. La finale est longue sur des notes fumées. Un vin qui semble un peu fatigué au nez mais dont la bouche possède encore toutes les caractéristiques d’un bon vin de terroir. Très Bien
Avis du Groupe : Excellent-5 Très Bien-5 Bien-4 Bof-0 Beurk-1

Riesling 1979 – Gustave Lorentz : le nez est intense, avec des arômes d’encaustique, de camphre et de feuille sèche. La bouche est fine, pure et légèrement épicée avec un finale un peu courte.  Un vin qui a été bien conservé, et qui se présente sur son coté variétal avec une certaine évolution. Une bouteille bien conservée dans une grande année à riesling. Bien
Avis du Groupe : Excellent-3 Très Bien-4 Bien-6 Bof-2 Beurk-0

Septième série : deux Rieslings demi-secs sur marnes et calcaire

Les vins moelleux sont-ils également influencés par leur terroir ? Pour présenter deux expressions différentes, deux vendanges tardives du millésime 1997 sont choisies. Le style de chaque vin est très différent, surtout au niveau de la profondeur en bouche qui ne dépend pas de la sucrosité. Les grands vins de terroir peuvent donc aussi être moelleux, et de surcroît ils plaisent énormément.

Riesling Kappelweg Vendanges Tardives 1997 – Rolly-Gassmann (21.4€ ,Marnes calcaires gris-bleu du Rupelien) : Le nez est intense avec des arômes d’orange confite, d’écorce d’agrumes, et un léger pétrole. La bouche est moelleuse en attaque, suivi par une acidité assez présente combinée à une amertume qui rappelle l’écorce d’agrumes. La fin de bouche est très longue, à la fois sur l’acidité et les arômes du nez. Une cuvée nette au style tendu, qui minéralise déjà fortement. Très Bien
Avis du Groupe : Excellent-3 Très Bien-9 Bien-2 Bof-1 Beurk-0

Riesling Grand Cru Mambourg Vendanges Tardives 1997 – Marc Tempé (terroir marno-calcaire avec du fer): la robe est jaune citron pâle. Le nez est parfumé, complexe avec des notes d’hydrocarbures, de pain grillé et de citron confit. La bouche est fondue, dans un style demi-sec qui rappelle les goldkapsel allemand, avec des notes de beurre et de pralin. Le vin est profond, avec une minéralité qui se combine au moelleux pur donner un équilibre fondu très puissant. La longueur en bouche est impressionnante. Excellent
Avis du Groupe : Excellent-4 Très Bien-10 Bien-1 Bof-0 Beurk-0

Une dégustation intéressante par la diversité des vins dégustés, mais surtout par son coté interactif, les participants ayant montré que les approches du riesling et des terroirs pouvaient être très différentes. Ainsi, plus le terroir est marqué, plus la diversité des appréciations en font des vins peu consensuels. A chacun ensuite de déterminer le style des vins qu’il affectionne le plus, de manière à optimise ses dégustations et ses achats.
Le thème des rieslings de terroir est inépuisable, et ce n’est pas en 16 vins qu’on peut faire le tour de la diversité des terroirs alsaciens. Il y a encore de belles opportunités de faire d’intéressantes dégustations, en particulier celle du 5 novembre 2006 à venir.

Thierry Meyer

Pour connaître la signification des appréciations (Bien, Très Bien…), cliquer ici