12 septembre 2006
Petite dîner de semaine à la Taverne Alsacienne pour goûter quelques vins récemment rentrés dans la cave, ainsi que chercher des accords avec de nouveaux plats.
Amuse bouche
Parmi les amuses bouche, à noter un sushi aux légumes très intéressant avec des morceaux de carottes crues qui relèvent le goût du muscat 2005.
Muscat Tradition 2005 – Paul Spannagel : la robe est pâle, le nez très parfumé, net et frais sur le raisin frais et la poire, marquant une belle maturité des raisins. La bouche débute par un peu de gaz, puis poursuit sur un équilibre sec, léger avec du gras, soutenu par une acidité fine et discrète. Un vin encore jeune mais très élégant, avec une combinaison de fraîcheur et de maturité qui signe les bons muscats alsaciens. Bien
Foie Gras de Canard Poêlé, Figue et Compotée de Sureau
Une nouvelle recette de foie gras maison travaillé à la figue et au sureau fraîchement cueilli. Le foie gras cru est rapidement poêlé pour conserver du moelleux, et la figue et le sureau apportent une touche fruitée sans tomber dans l’excès de sucre. L’accord avec un pinot gris demi-sec est très bon, les sucre modérés du plat et du vin se neutralisent pour ouvrir le chemin à une rencontre entre le gras du vin et le gras du plat. Le sureau apporte une touche acide moins prononcé que la myrtille, permettant au plat de ne pas être dominé par l’acidité du vin. Un accord très intéressant d’autant plus plaisant que le vin se trouve facilement (en vente 8€ à la cave vinicole voisine)
Pinot Gris Marnes et Calcaire 2004 – Cave Vinicole de Turckheim : La robe est jaune doré. Le nez est net, de bonne intensité, fumé avec des arômes de fruits secs et de sous-bois. La bouche est moelleuse en attaque, puis riche et équilibrée avec une fine acidité. Le vin est de bonne concentration, reste élégant, souple et très pur en bouche avec des notes de fumée et de fruits jaunes en finale. Un très beau terroir, le Heimbourg, désormais renommé Marnes et Calcaires, a donné une belle cuvée de style demi-sec en 2004 (22 g/l de sucre résiduel). J’ai découvert ce flacon à l’aveugle lors du concours des Pinots Gris du Monde, voilà une médaille d’argent bien méritée. Très Bien
Filet d’Elbot sauvage aux Cèpes des Vosges
En préparation de la soirée Rolly-Gassmann, nous goûtons ce fameux Elbot aux cèpes, avec trois rieslings très différents. La cuisson un peu forte du poisson l’assèche un peu, et il retrouve avec les cèpes un équilibre plus moelleux. L’ensemble est à la fois minéral et iodé, parfait pour chercher les accords avec les vins. Le riesling Wiebelsberg propose une texture onctueuse intéressante, mais la densité du vin et l’intensité de ses arômes domine le goût du plat. Le Vent d’Est 2002 est un vin très plaisant, dont la fraîcheur acidulée va réveiller les cèpes. Le Riesling Andlau 1988 a une légère évolution qui va bien s’accorder avec les cèpes, mais pas beaucoup d’accroche sur le poisson lui-même. Les trois vins sont issus de terroirs gréseux, il faudrait peut-être rechercher les vins de terroir calcaire sur un tel plat, comme en 2004 avec le riesling Clos Windsbuhl de Zind-Humbrecht ou le Riesling Frédéric Emile de Trimbach.
Filet de Sandre sur Choucroute Nouvelle, Crème de Riesling et Purée aux Truffes d’été
Le deuxième plat de poisson va résonner différemment avec nos trois vins. La choucroute apporte un coté croquant et acidulé, que vient adoucir la crème de rieslings. Un plat plus classique, qui se mariera bien avec les vins les plus vifs. Le Riesling Wiebelsberg 2003 est à nouveau dominant sur le plat, sa puissance n’étant pas équilibrée parla choucroute. Il faudrait servir le poisson avec un risotto aux herbes et cèpes pour équilibrer la puissance du vin. Le Riesling Vent d’Est continu son chemin, avec un bel accord classique sur l’acidité de la choucroute, qui lui permet d’aller à la rencontre du sandre. Le terroir gréseux donne ici toute sa finesse pour se marier avec la chaire délicate du sandre. La croûte de pomme de terre et la choucroute apportent en outre du croquant, qui passe très bien avec la fraîcheur du vin. Le riesling Andlau 1988
Riesling Grand Cru Wiebelsberg 2003 – Guy Wach : La robe est or blanc, avec des reflets verts. Le nez est net, ouvert et minéral avec des arômes de citronnelle, de pêche et de miel. L’attaque en bouche est moelleuse, puis grasse et minérale avec beaucoup de finesse, l’acidité étant discrète. La finale est longue et minérale. Un beau 2003 à maturité, dense et minéral à souhait. Très Bien
Riesling Vent d’Est 2002 – Domaines Schlumberger (1/2 bouteille) : la robe est pâle avec des reflets verts, brillante. Le nez est intense, fruité, très riesling avec des arômes de raisin, de pamplemousse et de rhubarbe. La bouche est fruitée en attaque, sèche, assez grasse et très minérale. Le vin est très facile à boire, une gorgée en appelant rapidement une autre. Un vin qui parait simple en apparence, mais qu’on boit avec plaisir. En demi-bouteille, le vin est à maturité. Très Bien
Riesling Andlau 1988 – Guy Wach (1/2 bouteille) : le nez est discret, délicat avec des arômes de fleur séchée, de réglisse sauvage et d’agrumes, évoluant à l’aération sur des notes de fruits acidulés. La bouche est sèche en attaque, fraîche et fine, développant une minéralité fine sur une matière mure. L’acidité est présente, mure et équilibre ce vin qui parait encore très jeune. La finale est sèche, de bonne longueur avec des arômes d’encaustique qui trahissent les 18 ans d’âge du vin. Avec ses 18 ans, ce vin a atteint sa majorité. Issu d’un terroir gréseux en contrebas du grand cru Wiebelsberg, voilà un superbe flacon de bonne concentration, presque supérieur au Riesling Grand Cru Kastelberg 1988 de la même maison. Très Bien
Sablé aux Quetsches, Crème Chibouste à la Cannelle
Une recette de saison confectionnée avec des petites quetsches d’Alsace très parfumés et encore légèrement croquantes en bouche. La combinaison des notes de prune et de cannelle va ouvrir un superbe accord d’arômes et de texture avec le gewurztraminer 1988, avant que le riesling SGN ne vienne faire connaissance avec la crème Chibouste, le style inhabituel de cette cuvée allant ici parfaitement bien avec le plat. Le Tokay SGN 1989 de Hugel est un extra-terrestre dans la catégorie des grands liquoreux alsaciens, sa robe rappelle un Sauternes 76 ou les vins du Rangen récoltés en 1993. A boire pour lui-même, en fin de repas.
Gewurztraminer 1988 – Guy Wach (1/2 bouteille) : Le nez est parfumé, complexe et légèrement évolué, avec des arômes de menthe sèche, de cuir, de muscade et d’anis, évoluant à l’aération sur des arômes de poire mure. La bouche est moelleuse en attaque, puis épicée et ronde avec une légère amertume qui se apparaît progressivement. La finale est ronde et épicée, avec des notes poivrées. Une belle cuvée de gewurztraminer épicé qui est à maturité. Très Bien
Riesling Grand Cru Kastelberg Sélection de Grains Nobles 2000 – Guy Wach : Le nez est intense, très pur avec des arômes d’abricot et de miel. La bouche est initialement moelleuse (58g/l de sucre résiduel), puis très fluide, fruité avec une acidité discrète, dévoilant des arômes de pêche des vignes. La fin de bouche est plus sèche, longue et très pure. Je ne retrouve pas le coté terroir de cette cuvée bue en mai dernier. L’acidité n’est pas trop persistante, et je n’ai pas retrouvé les arômes de riesling SGN au nez. Très Bien
Tokay Pinot Gris Sélection de Grains Nobles Cuvée « S » 1989 – Hugel et Fils : La robe est ambre foncé, orangée, tirant sur le brun. Le nez est intense, très riche et surmûri avec des arômes de miel, de pralin et de datte. La bouche est liquoreuse en attaque, puis très concentrée sans être lourde, évoluant sur une un registre aromatique très complexe qui ajoute aux arômes du nez des notes de cuir et de truffe. La finale est longue pour ce vin qu’on boit sans se fatiguer. Un flacon d’exception, dune précision inouie pour une telle richesse en sucre. Excellent
Pour ce dernier flacon, Marc Hugel apporte les précisions suivantes :
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Le Tokay SGN 1989 "S" est une "crèmes de tête" réalisée avec les raisins les plus rôtis du millésime 1989. Ce Tokay SGN 1989 "S" est encore à ce jour, le vin le plus concentré jamais produit chez Hugel. Récolté le 24 octobre 1989 après une semaine de temps sec, chaud et ensoleillé (comme celui que nous savourons depuis 15 jours), le moût titrait 30.6° en puissance (214 Öechsle) et la qualité du botrytis était remarquable. Ce vin a fermenté trois mois et très lentement dans deux pièces de 5 ans d’âge de 228l chacune. A la mise en bouteille, en Juillet 1990, il titrait 11° d’alcool et 340g de sucre résiduel ainsi que 6,3g/l d’acidité ce qui est idéal pour un vin de cette richesse. Ce vin extrêmement confidentiel n’a jamais été commercialisé.
Merci à Jean-Philipe Guggenbuhl d’avoir partagé ce moment d’émotion !
Un dîner très intéressant, qui montre une fois de plus que la recherche d’accords mets/vins demande de l’exercice, les accords n’étant pas forcément là où on les attend. Les demi-bouteilles de 1988 de Guy Wach ont été retrouvées dans la cave du domaine, espérons qu’il en reste encore suffisamment pour pouvoir en remettre quelques unes en vente.
Thierry Meyer
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