L'Oenothèque Alsace

OENOALSACE.COM

Visite au Domaine Schlumberger (Guebwiller)


Visite au Domaine Schlumberger à Guebwiller
15 novembre 2003, Guebwiller


Le domaine produit environ 600 000 bouteilles par an, et emploie près de 70 personnes. La récolte 2003 a produit 3600hl, soit une moyenne de 28hl/ha (-60% par rapport à la normale. La quantité énorme de grands crus et de vignes en coteau explique les rendements moyens même en année normale.



Dégustation sur fût et en cuve de quelques vins :


Pinot Noir 2003 – Schlumberger : 13.2%, 3 semaines de macération. Un nez de cerise très fruité, une bouche épicée avec de beaux tanins et une bonne concentration qui ne souffre pas de surextraction. Une bonne réussite.


Sylvaner 2003 – Schlumberger : Le nez est mur et marqué par de l’amande. La bouche est minérale, fruitée et mure, très parfumée, avec ce goût typique de noisette fraîche. Un très beau sylvaner.


Muscat 2003 – Schlumberger : le nez est très marqué par des notes de raisin frais (majorité de muscat d’Alsace dans cette cuvée). La bouche est perlante, fruitée et légèrement musquée. Très bon.


Gewurztraminer Grand Cru Kessler 2003 – Schlumberger (parcelle de la Wanne): en fin de fermentation avec 12% déjà acquit, le nez est marqué par de la pomme, de la poire et du miel. La bouche est moelleuse et acidulée.


Gewurztraminer Grand Cru Kitterlé 2003 – Schlumberger : le nez regorge de banane et de poire. La bouche est très fine et lus achevée que le Kessler, avec de la poire mure en finale.


Gewurztraminer Grand Cru Kitterlé 2002 – Schlumberger : encor en cuve, le vin est beaucoup plus achevé, avec du liche au nez, et une bouche encore marquée par le gaz mais moelleuse, acidulée avec beaucoup de finesse.


Pinot Gris Grand Cru Kitterlé 2003 – Schlumberger : le nez est floral, épicé, avec une bouche assez moelleuse, des arômes de pomme jaune et un peu de gaz. Légère amertume en finale.


Pinot Gris Grand Cru Kitterlé 2002 – Schlumberger : Le nez est un peu fumé un peu musqué. La bouche est fine et moelleuse, très aromatique. La concentration vient du passerillage.


Pinot Gris Grand Cru Spiegel 2002 – Schlumberger : Le nez est marqué par de la truffe blanche et par un beau botrytis. La bouche est ronde, riche et moins acidulée que le précédent. Si le Kitterlé est soumis aux vents d’ouest chauds qui descendent de la montagne, le Spiegel est orienté plein Est et son sol argileux est propice au développement de la pourriture noble.


Pinot Gris Grand Cru Spiegel Sélection de Grains Nobles 2001 – Schlumberger : le nez est marqué par des arômes d’abricot et de pêche, de raisin flétri et de botrytis. La bouche est confite, acidulée, et moelleuse. On est proche des 100g/l de SR pourtant e vin reste aérien.


Pour se faire a bouche avant de passer au riesling, nous nous faisons violence avec un :


Riesling Grand Cru Saering 1998 – Schlumberger : encore en cuve en attendant la mise en bouteille, le vin est déjà marqué par des hydrocarbures au nez avec une forte minéralité. La bouche est sèche, dense, mais conserve un superbe fruité en milieu de bouche. N’oublions pas que la bouche est encore marquée par le PG grains nobles juste recraché, pourtant c’est bien la maturité de ce riesling qui apparaît derrière sa minéralité. Un tour de force.


Riesling Grand Cru Saering 2002 – Schlumberger : le nez est floral, avec une bouche très vive et puissante, citronnée. L’impression de mastiquer des lames de rasoir qu’on trouve dans certains 96 se retrouve agréablement dans un 2002.


Riesling Grand Cru Kitterlé 2002 – Schlumberger : issu d’une vigne plantée en 59, le nez est mur et semble annoncer une bouche un peu moelleuse alors qu’en réalité on a un vin sec et dense. Ce contraste rappelle un peu un jeune chenin de Loire. Belle minéralité.


Nous quittons la cuverie pour rejoindre le caveau de dégustation, ou nous attendent une belle collection de verres Riedel disposés sur une table en chêne de plus de 8m de long, d’un seul tenant. Tout autour de la table les grilles des portes ferment l’oenothèque qui renferme des vins réservés à la dégustation, dans des millésimes qui remontent très loin…


Riesling Grand Cru Saering 1996 – Schlumberger : Un nez d’hydrocarbure marqué par une légère évolution (cire et encaustique). La bouche est acidulée, marquée par du citron vert et des notes d’encaustique. Un vin qui arrive tout doucement à maturité.


Riesling Grand Cru Kitterlé 1999 – Schlumberger : Le nez est plus complexe, minéral et marqué par des fleurs blanches (tilleul, acacia), avec une touche de fruits secs et de miel. La bouche est fine et complexe, assez riche et dense, avec un peu de gaz. Un vin encore jeune mais déjà très fin, qui finit en bouche sur des notes de pamplemousse.


Riesling Grand Cru Kitterlé 1985 – Schlumberger : Le nez est complexe, marqué par des fruits secs, du miel, un eu de houblon et de l’encaustique. Des notes pétrolées apparaissent à l’agitation. La bouche este fruitée, marquée par des agrumes, avec beaucoup de finesse. La finale est en queue de paon, mais pouvait-il en être autrement avec ce terroir ? Du très bon riesling !


Gewurztraminer 2000 Cuvée Christine – Schlumberger : originaire du Grand Cru Kitterlé, la vendange tardive du domaine a une robe dorée. Le nez est mielleux, avec du liche et du citron confit. La bouche est très moelleuse mais très fine, avec du pralin et du miel. On a une bonne sensation de raisin flétri en bouche, la finale est longue. Un superbe équilibre, qui confirme la grande qualité de nombreuses GW VT en 2000.


Gewurztraminer Cuvée Anne 1998 – Schlumberger : La sélection de grains nobles du domaine est cette fois issu de la Wanne, cette parcelle historique dans le Grand Cru Kessler. Le nez est botrytisé, mielleux avec des notes grillées. La bouche est acidulée, minérale avec une touche iodée qui rappelle certains terroirs calcaires (alors qu’on est sur du poudingue, mélange de grès avec des marnes). La bouche évolue vers de l’écorce d’orange en gardant beaucoup de finesse, avec une longue finale. Superbe.


Gewurztraminer Cuvée Anne 1971 – Schlumberger : issue également de la Wanne, le nez est iodé, marqué par de la cire, de la mandarine confite, du pain d’épices et du raisin de corinthe. La bouche est kirschée, fumée avec des arômes de foin séché et de cognac, très complexe. La structure acide semble ne pas vieillir, et si le vin prend de la patine, il ne semble pas fléchir. Va probablement se conserver en l’état pendant les 30 prochaines années, on est sur un équilibre proche de la perfection entre terroir et cépage. Exceptionnel.


Quelles conclusions tirer d’une telle dégustation ? Les terroirs de Guebwiller ont tous une forte personnalité. Personnellement j’apprécie la minéralité du Grand Cru Kitterlé dans les Rieslings, sans que l’acidité ne soit trop présente. Les agrumes verts et une forte acidité sont plus marqués dans le Grand Cru Saering. Le gewurztraminer est roi dans le Kessler et le Spiegel, ou il produit de superbes vins moelleux, sans lourdeur.


Enfin il faut reconnaître la passion du chef de cave Alain Freyburger qui a su donner un supplément d’âme à tous les vins dégustés. Ensuite, 2002 qui s’annonce comme un millésime mur en Alsace a été très bien maîtrisé au domaine, avec une belle minéralité et pas d’abus de ces notes d’arachide qu’on trouve dans de nombreux vins cueillis en légère surmaturité. Avoir la chance de déguster une partie des 2003 et 2002 en cuve est un privilège rare pour des amateurs en Alsace, et permet de comprendre comment le vin se forme pour chacun des cépages, et comment le terroir marque déjà des vins très jeunes.


Thierry Meyer