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Verticale de Riesling avec la Confrérie Saint-Etienne

17 novembre 2007 – en prélude au dîner annuel autour du riesling à la Taverne Alsacienne, la dégustation de vieux millésimes au Château de Kientzheim organisée avec la Confrérie Saint-Etienne était l’occasion de sortir des trésors enfouis depuis de nombreuses années, et de redécouvrir la magie des terroirs alsaciens lorsqu’ils traversent le temps. Cette année encore, séquence émotion avec 17 vins de 1993 à 1953.

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Les participants sous le charme au Château de Kientzheim

Riesling 1993 – Klipfel (Barr) : La robe est dorée avec un bel éclat. Le nez est intense, mur, légèrement fumé avec une belle netteté. La bouche est pure, souple et légère avec une matière fine. Un riesling classique à maturité dans un bon millésime pou ce cépage, qui ne montre pas de signe de fatigue grâce à sa bonne pureté. Il devrait se conserver encore 10 ans au moins. 13/20

Riesling Drei Exa 1987 – Paul Ginglinger (Eguisheim) : La robe est or blanc, cristalline. Le nez est intense, à la façon d’un jeune sauvignon avec des arômes de buis, de pêche, d’agrumes. La bouche est sèche et droite en attaque, puis ample, riche et claquante, avec beaucoup de pureté et une longue finale tirée par une belle acidité. La belle arrière saison du millésime 1987 a donné de beaux vins lorsque ceux ci ont été récoltés à maturité. Devrait continuer de bien évoluer sur les 15 prochaines années. 14/20

Riesling 1985 – Willy Gisselbrecht (Dambach la Ville) : la robe est or blanc avec des reflets verts. Le nez est intense, avec des notes évoluées de foin, de fumée et une touche vanillée. La bouche est fine et légère en attaque, puis aérienne avec une petite salinité et une note de menthe sèche en finale. Le vin est bien né dans une grande année, récolté mur et vinifié proprement, mais a passé son apogée et arrive en bout de course au niveau de son évolution. A boire sans regret et sans trop tarder pour se faire plaisir, dans les 5 ans. 12.5/20

Riesling 1983 – Ringenbach-Moser (Sigolsheim) : la robe est brillante, de nuance or blanc. Le nez est mur, intense et net avec des fruits à chair blanche, évoluant sur des notes florales. La bouche est ample, sèche et nette avec du gras, présentant une légère amertume en finale. L’ensemble manque un peu de complexité mais se tient parfaitement à 24 ans d’âge pou un millésime pourtant chaud, et est bien charpenté pour affronter les 10 années à venir. 14/20

Riesling Réserve Schlossberg 1982 – Jean-Paul Sick (Kaysersberg) : le vin ne revendique pas l’appellation Grand Cru alors qu’elle est déjà en vigueur pour ce cru.  Le millésime humide est normalement favorable à un terroir drainant comme le Schlossberg. La robe jaune doré intense et le nez oxydé probablement éventé laissent penser à un problème de bouchon, problème confirmé par une bouche éventée qui présente malgré tout une belle minéralité. Probablement encore un beau vin lorsque le bouchon est bon. A regoûter.

Riesling Schoenenbourg 1979 – Mittnacht-Klack (Riquewihr) : La robe est or pâle avec des reflets verts, brillante. Le nez est intense et net avec des arômes de fumée, de truffe et une minéralité aromatique complexe. La bouche est ample, fraîche en attaque puis dense et minérale, l’expression du cru se présentant merveilleusement bien avec une salinité légèrement amère et des notes de pamplemousse et d’ortie en finale. La combinaison terroir/cépage/millésime/vinificateur est idéale sur ce vin de 28 ans, archétype du grand riesling alsacien à maturité. Premier coup de cœur de la dégustation pour ce vin qui se tiendra encore une bonne vingtaine d’années. 17/20

Riesling Réserve Exceptionnelle 1975 – Kuentz-Bas (Husseren Les Châteaux) : les réserves exceptionnelles sont généralement issues du Pfersigberg chez Kuentz-Bas. Ce vin du difficile millésime 1975 présente une robe dorée, un nez initialement un peu vieux sur le cuir et le rancio qui disparaît à l’aération pour laisser place à des note de fleurs blanches et d’agrumes beaucoup plus agréables. La bouche est ample en attaque, puissante avec une belle acidité et du gras. Dans un millésime délicat, le terroir parle de nouveau et propose un vin bien structuré. A boire dans les 10 ans pour ne pas trop tirer sur la corde. 15/20

Riesling Sigillé 1973 –  Cave de Pfaffenheim : La robe de nuance or blanc présente des reflets verts. Le nez est d’une jeunesse incroyable, floral et encore relativement discret. La bouche est ample en attaque, minérale et très sapide avec beaucoup d’élégance aromatique et une grande pureté. Un grand vin probablement originaire d’un beau terroir, qui vieillit admirablement bien dans un grand millésime souvent méconnu en Alsace. Pourra se garder encore 15 ans sans problème à ce rythme. 16/20

Riesling 1972 – Josmeyer (Wintzenheim) : La combinaison d’une robe dorée, d’un nez oxydé et terreux avec une bouche cassée fait penser à un bouchon défectueux. 1972 était une année de faible maturité, donnant des vins très clairs à forte acidité. Le Riesling 68 de la maison Josmeyer se goûtait très bien lors d’une précédente édition, renforçant le bénéfice du doute. A regoûter.

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Série de 1993 à 1972

Riesling Réserve Exceptionnelle 1971 – Hugel et Fils (Riquewihr) : ancêtre des cuvées Jubilée de la maison Hugel, cette cuvée originaire des parcelles propres sur le Schoenenbourg propose un équilibre proche du 79 de Mittnacht-Klack, dans un très grand millésime. La robe est jaune doré avec un bel éclat. Le nez est mûr, complexe et d’intensité moyenne, sur la fumée, le pain grillé, la truffe, évoluant par palier à l’aération. La bouche est dense, riche en attaque  avec une sensation minérale puissante, évoluant sur un équilibre ample, droit avec beaucoup de gras. La minéralité gustative est très présente du début à la fin, donnant un caractère sapide important. Un gros coup de cœur pour ce grand vin intemporel, qui se gardera encore 20 ans au moins. 19/20

Riesling 1966 – Réserve de la Confrérie St Etienne : une étiquette qui ne mentionne  pas l’origine du vin. La robe est jaune citron, le nez présente un caractère poivré, avec des notes de camphre, de menthe sèche et d’ortie. L’attaque en bouche est droite, puis le vin se montre sec, croquant et très pur, avec une salinité prononcée. L’équilibre rappelle le terroir du Schoenenbourg du vin précédent, mais une note de sauge et de bois sec en finale laisse penser à un bouchon pas tout à fait parfait. A boire dans les 10 ans. 14/20

Riesling 1966 – Union Viticole d'Alsace (Colmar) : un autre riesling peu évolué à plus de 40 ans d’âge, sur un équilibre classique : robe jaune or, nez d’intensité moyenne, discret avec de fines notes de fleurs sèches. La bouche est ample, droite et ure avec du gras et une légère amertume en finale. Belle évolution pour ce vin très classique à boire dans les 15 ans. 14/20

Riesling Réserve 1966 – Trimbach (Ribeauvillé) : la robe est jaune doré, intense et brillante. Le nez est net, intense avec des arômes d’agrumes de fleurs séchées, de moka et de grillé. La bouche est pure, sèche et équilibrée avec une légère amertume et des arômes de fumée et de silex en finale. Le vin est bien construit, dense avec une belle acidité. Etiquette blanche, collerette jaune, est-ce que cela correspond à la cuvée Réserve actuelle ? A boire dans les 15 ans.

Riesling 1964 – Albert Schoech (Ammerschwihr) : la robe est jaune paille, brillante. Le nez est ouvert, légèrement éventé avec des notes de fleurs et de pain grillé. La bouche est ample en attaque, puis légère, nette avec du gras, avec une finale fumée. Le vin se montre conforme au millésime mur mais a probablement souffert d’un bouchage défectueux. A regoûter pour confirmer sa garde prévisible. 12/20

Riesling Cuvée Exceptionnelle 1964 – Bott Frères (Ribeauvillé) : La robe est jaune citron avec des reflets or, dense et brillante. Le nez est net, pur sur le citron, les fruits mûrs et la menthe fraîche. La bouche est ample, légèrement moelleuse en attaque, puis minérale et très sapide avec une bonne acidité très typique des terroirs de Ribeauvillé. La finale est longue. A plus de 40 ans d’âge, le vin issu d’une vendange tardive est d’une jeunesse remarquable dans un grand millésime. A boire dans les 20 ans. 16/20

Riesling 1961 – Kuentz-Bas (Husseren les Châteaux) : le vin se montre une nouvelle fois très jeune avec une robe claire et un nez net, minéral et toasté, qui se dévoile par palier. La bouche est pure, nette et croquante en attaque, puis droit et pur avec une belle acidité. Seul un grand terroir comme le Pfersigberg peut donner une telle structure à un vin de 46 ans d’âge. L’équilibre est remarquable et le vin se conservera encore 20 ans au moins. Magnifique. 16/20

Riesling Réserve 1953 – Pierre Sparrr (Sigolsheim) : vin le plus ancien de la série, il nous fait entrer dans un stade d’évolution plus avancé sans pour autant être vieux : le nez est complexe,  très mur avec des arômes d’alcool de fruit (framboise, mirabelle), des notes florales, du camphre, une ointe de fumée, de cuir… La bouche est droite en attaque, patinée par le temps mais très nette avec une bonne acidité, évoluant sur un équilibre suave avec une finale sur les agrumes confits. Un beau quinquagénaire dans un flacon parfait, le bouchon d’origine et la capsule en étain ayant parfaitement rempli leur rôle en conservant un niveau sous le bouchon de moins de 2cm. Un grand moment d’émotion qui se reproduira la prochaine fois qu’une main heureuse trouvera un tel vin dans l’oenothèque de la confrérie. 16/20

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Série de 1971 à 1953

La descente des millésimes a fourni son lot de grandes émotions, et indépendamment de la qualité des millésimes, les terroirs ont rempli leur rôle en assurant une longévité parfaite aux meilleures cuvées. Les années 80 ont rapidement laissé place à des vins des années 70 encore en forme, puis à une sélection de grands vins des grands millésimes des années 60. Les terroirs calcaires, majoritaires dans la sélection, ont montré leur grande capacité de conserver une structure ample et charpentée aux vins, même après 40 ans. Le maillon faible de la chaîne restant bien entendu le bouchon.
En 2008 nous remplacerons les vieux rieslings par les vieux sylvaners, cépage qui représentait environ un tiers des surfaces plantées dans les années 60, et souvent planté sur les meilleurs coteaux de la région.

Thierry Meyer

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