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Les Pinots Noirs de la Confrérie Saint-Etienne


Les Pinots Noirs de l’Oenothèque de la Confrérie Saint-Etienne
17 Novembre 2005, Château de Kientzheim

L’Oenothèque de la Confrérie Saint-Etienne encave des vins qui ont reçu le Sigillé de Qualité, et le pinot noir, qu’il soit rouge ou rosé, est apparu dans les années 60. La dégustation du 17 novembre a permis de faire un tour d’horizon des flacons disponibles, panachant des styles et des millésimes différents. Les millésimes ont été goûtés dans l’ordre du plus vieux au plus jeune, pour éviter une éventuelle « descente aux enfers » : 1970-1971-1978-1979-1983-1985-1988-1990-1992.







Photo : la série des vins des années 70



Pinot Noir 1970 – Kuehn (Ammerschwihr) : La robe est pelure d’oignon, assez clair avec un disque épais et beaucoup d’éclat. Le nez est parfumé, avec des arômes d’anis, de café, de liqueur de framboise, tirant vers le cognac. La bouche est souple, légère mais aqueuse, avec des notes de vieux bois secs et une finale courte. Un vin qui a du être très intéressant par le passé, mais qui a dépassé son apogée depuis longtemps. Bof


Pinot Noir 1970 – Armand Wischlen (Westhalten) : La robe est ambrée, assez dense toujours avec une belle brillance et un disque épais. Le nez est assez parfumé, avec des notes de champignon (girolle, champignon de paris), moyennement agréable. La bouche est assez vive, avec une bonne tenue du fruit et des tanins assez sensibles. La finale termine sur des notes de paille assez persistantes. Un vin qui est en bout de course mais qui laisse entr’apercevoir de jolis restes. Bof


Pinot Noir 1971 – Armand Wischlen (Westhalten) : La robe se pare de nuances rouge avec des reflets tuilés, avec de belles jambes. Le nez est très parfumé, sur une dominante de confiture de fraise très plaisante, suivie par des notes de caoutchouc moins agréables. La bouche est assez grasse, bien structurée avec des tanins présents et fondus. L’acidité est un peu en retrait mais le vin se tient encore bien. La finale est assez longue et développe des notes de réglisse. Le bon millésime 1971 a produit un pinot noir qui arrive en fin d’apogée, à boire sans trop tarder, mais qui rappelle un vieux bourgogne rouge sans aucune note de madérisation ou d’assèchement. Bien


Pinot Noir « Brand » 1978 – Armand Hurst (Turckheim) : La robe est rouge-noir, assez profonde et dense, avec du dépôt. Le nez est fumé avec des notes de ronce et de cassis. La bouche est vive, sèche et amère avec des notes de pierre à fusil et des épices qui rappellent une syrah du Sud de la France. Un vin corsé et épicé comme le pinot noir sait l’être en Alsace, qui rappelle le Pinot Noir Wintzenheim 2001 de Zind-Humbrecht bu le mois dernier. Le style est très différent des pinots fruités et souples, mais l’évolution est très faible. L’extraction est assez importante mais le raisin est mur donc il n’y a pas de verdeur. Doté d’un potentiel de garde important, le vin devrait se maintenir plus de 10 ans encore dans cet état. Très Bien




Photo : la première série de 4 vins montre des robes d’intensité et de nuances fort différentes (les vins sont dans l’ordre de droite à gauche)


Pinot Noir 1978 – Kuehn : La robe est rouge avec des reflets ambre. Le nez n’est pas très expressif, évoque le pain grillé et le champignon. La bouche est assez souple avec du gaz en attaque, mais manque de corps et développe une acidité assez marquée et des tanins un peu secs. La finale est courte et amère. Un vin qui se tient encore à cause de la maturité moyenne des raisins qui génère de l’acidité et des tanins, mais qui n’est pas très plaisant. Bof


Pinot Noir “Hugel” 1979 – Hugel et Fils (Riquewihr) : la robe est rouge rubis avec des reflets acajou et des bords tuilés. Le nez se dévoile par couche successive, l’aération le faisant passer successivement de notes de houblon, un peu fumées, à des arômes plus nets de pain grillé et de tabac. La bouche st sèche, grasse et assez amère, avec une acidité assez élevée. La finale est longue et revient sur des notes de pierre à fusil et de fût. Un vin qui a encore de la tenue même si le fruit a un peu disparu, qui se gardera encore quelques années. Bien




Photo : la série des vins des années 80 et 90


Pinot Noir Sigillé 1983 – Cave Vinicole de Pfaffenheim : la robe est rouge rubis foncé assez profond, avec un bel éclat. Le nez est assez fruité sur des notes de cerise, sans trace d’évolution. La bouche est assez souple, corsée avec une bonne acidité et des tanins fins et fondus. Le fruit est encore très présent avec des notes de caramel, ce qui donne un équilibre remarquable. Un vin en pleine apogée, soupe et mûr, qui se boira très bien dans les 10 prochaines années. A garder précieusement en cave et à sortir aux grandes occasions. Très Bien


Pinot Noir « Sélection » Rouge de Saint-Hippolyte 1983 – René Klein (Saint-Hippolyte) : la robe est rouge rubis avec des reflets brique. Le nez est parfumé et complexe, métallique, avec des notes de pruneau, d’encens, de poivre et de réglisse, développant des notes de griotte à l’aération. La bouche est beaucoup plus sèche avec une acidité très marquée, et surtout une sensation très herbacée qui rappelle un goût de rafle. L’extraction poussée a donné des parfums complexes au nez mais la bouche manque de souplesse, l’âge ayant décharné le vin. Un vin qu’il aurait fallu boire jeune. Bof


Pinot Noir 1985 – Joseph Riefflé (Pfaffenheim) : La robe est rouge orangé, limite pelure d’oignon. Le nez est mûr, fruité sur des arômes de cassis et de pruneau, de fraise et de figue. La bouche est souple, légère avec du gras en attaque mais des tanins qui se font très présents en finale. Le vin est très bien né mais évolue très vite à l’oxydation, le nez prenant rapidement des notes de viande séchée. Un vin survivant, bien né avec un bel équilibre mûr et gras, mais à boire rapidement pour profiter de sa souplesse avant qu’il ne disparaisse. Un style assez similaire au 71 de Wischlen, avec 14 ans de moins. Bien


Pinot Noir Sigillé 1988 – Cave Vinicole de Hunawihr : La robe est rouge brique avec des reflets tuilés, mais conserve un bel éclat. Le nez est parfumé, légèrement boisé et toasté avec des notes d’épices et de prunelle. La bouche est assez dense, corsée avec des tanins assez souples, semblant très jeune. Le vin n’est pas le plus concentré mais garde un bel équilibre. La longue finale revient sur des notes fumées et de viande séchée. Une grande réussite dans un millésime parfois difficile pour le pinot noir, et un vin qui a  plus de 10 ans de garde devant lui. Très Bien


Pinot Noir Sigillé 1990 – Cave Vinicole d’Eguisheim (Wolfberger) : La robe est rouge-noir  assez foncé, légèrement tuilée sur les bords. Le nez est un peu animal à l’ouverture, puis à l’aération prend des arômes de fruits noirs murs et de fumée. La bouche est ronde, corsée et souple avec beaucoup de gras, les tanins sont mûrs et donnent de l’ampleur au vin. La matière est concentrée, et donne presque une impression de sucrosité. Voilà un pinot noir dans sa prime jeunesse, mûr et concentré, à boire dans les 15 prochaines années. Un grand pinot noir alsacien. Très Bien


Pinot Noir Sigillé 1992 – Cave Vinicole de Kientzheim : la robe est rubis assez foncé, élégante. Le nez est initialement assez boisé, puis développe des notes de fraise cuite. La bouche est moyennement corsée, légèrement fruitée en attaque, puis dévoile des tanins un peu verts qui donnent de l’amertume. Le vin est léger malgré une bonne extraction, mais sur une matière pas suffisamment mûre pour donner un vin de garde. Le vin n’évoluera peut-être pas très rapidement, mais ne se bonifiera pas dans ce style. A finir rapidement. Bof


Malgré quelques craintes à l’ouverture des bouteilles qui étaient un peu fraîches, la dégustation des vieux pinots noirs montre un niveau moyen assez élevé. En particulier, on se rend compte que l’aptitude au vieillissement n’est pas fonction de la coloration ou de l’extraction du vin, mais dépend bien de la maturité du raisin et de sa concentration. Ainsi les vins des années 70 se montrent encore à leur avantage, et les années 80 ont vu arriver des vins à l’extraction plus poussée, et les premières cuves élevées en bois neuf. Correctement aérées, les belles cuvées concentrées et mûres tiennent bien au vieillissement, la maturité des raisins servant d’étalon. Sur le panachage de domaines présentés, il est à noter que les trois vins qui se présentent le mieux sont des vins issus de caves coopératives (Eguisheim, Hunawihr et Pfaffenheim). Les lots Sigillés sont issus d’une sélection qui leur permet de présenter un bon niveau de qualité. Ces pinots supporteraient très bien et sans rougir des vins bourguignons de même millésimes.


Thierry Meyer