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Le muscat des années 90 à la Confrérie Saint-Etienne

21 septembre 2006. Le thème de la dégustation de vieux millésimes de Septembre au château de Kientzheim était les muscats de 1990 à 1998, avec des bonnes et des moins bonnes surprises parmi la sélection de vins de Barr à Orschwihr.

Si généralement les séminaires de vieux millésimes concernent des vins de 20, 30 voir 40 ans, il faut également parfois goûter des vins plus jeunes, et capturer l’état d’évolution de chaque cuvée au tournant de leur carrière. Entre 10 et 15 ans d’âge se joue l’avenir d’un vin. Ca passe ou ça casse. Certains vins sont encore sur leur pente ascendante, d’autres sont déjà plus évolué mais semblent également être sur un plateau de maturité qui a un bon potentiel de conservation. D’autres vins enfin sont à maturité mais leur fragilité suggère de les boire rapidement tant qu’ils offrent un grand plaisir de dégustations. Placer les vins dans chacune de ces catégories permet une meilleure gestion de l’Oenothèque, en minimisant le risque de boire des bouteilles ayant dépassé leur apogée.

Si de nombreux amateurs aiment le muscat d’Alsace pour sa fraîcheur et son croquant, les participants réguliers aux séminaires de vieux millésimes de la Confrérie Saint Etienne ont souvent pu déguster des vieux millésimes de muscat qui leur ont laissé une énorme impression : 1985, 1980, 1976, 1973, 1969, le muscat s’avère être un cépage qui vieillit admirablement bien, les arômes de raisin frais et de fleur de sureau laissant place à des notes de menthe sèche et d’épices.

Cette dégustation de muscats entre 10 et 15 ans d’âge avait donc un attrait supplémentaire pour les amateurs de ce cépage, car elle allait permettre de comprendre les étapes de la transformation du muscat entre son style jeune et son style vieux. La diversité des millésimes des années 90 complétait ce tableau très prometteur.

Muscat Dorfbourg 1998 – Albert Schoech (Ammerschihr) : la robe est jaune citron, avec une forte présence d’alcool et de glycérol. Le nez est mûr, avec des arômes d’ananas, de fruits confits et de miel, conservant de la fraîcheur. La bouche est moelleuse en attaque, puis fraîche avec une bonne acidité, évoluant sur un équilibre moelleux et rond. La finale est longue avec des notes de réglisse. Le vin est profond, riche et très mûr, encore dans un style très jeune. Le terroir est profond, le millésime a connu une belle arrière-saison, on est face à une cuvée ample qui se conservera bien 15 ans. Un muscat d’apéritif, à boire sur un melon au jambon cru, voir un foie gras de canard. Bien

Muscat Cuvée de la Comtesse 1997 – Cave Wolfberger (Eguisheim) : la robe est jaune doré. Le nez est plus chaud, très mûr avec des arômes de bouillon blanc, de menthe, de caramel et de chocolat blanc. Une fermentation malolactique n’est pas exclue. La bouche est grasse en attaque, souple avec une légère touche moelleuse, conservant encore un peu de fraîcheur mais chutant rapidement par manque d’acidité. Cette bouteille semble fatiguée, il faudra regoûter la bouteille. Si ce n’est pas un vieillissement prématuré d’un flacon en particulier, la cuvée devra être rapidement bue. Bien

Muscat Cuvée Caroline 1997 – Paul Ginglinger (Eguisheim) : la robe est jaune citron. Le nez est discret, végétal avec des arômes d’agrumes frais et de citronnelle. La bouche est fraîche en attaque, dense et minérale avec une sensation pierreuse sur la langue. Une touche liégeuse et l’examen visuel  du bouchon laissent penser à une légère altération du nez. La structure du vin possède suffisamment de corps pour tenir encore 15 années, mais le style est à confirmer. Bien

Muscat Sigillé 1996 – André Schneider (Eguisheim) : La robe est jaune doré. Le ne est muscaté, frais et de bonne intensité avec des notes de buis. La bouche est riche en attaque, puis croquante, avec des arômes de fruits acidulés, carambole, groseille à maquereau. Le style reste léger mais l’acidité du millésime a permis une bonne conservation de ce vin qui demeure sur un style jeune, même à 10 ans d’âge. Une bouteille à regoûter dans les 5 ans pour suivre son évolution, le vin restant sur un équilibre fragile. Bien

Muscat Sigillé 1996 – François Braun (Orschwihr) : La robe est jaune citron pâle. Le nez est discret, avec des notes de silex et d’herbe coupée. La bouche est fraîche, dense avec un léger moelleux en attaque, mais affiche rapidement une pointe liégeuse  désagréable. Le bouchon en liège aggloméré n’est probablement pas prévu pour une garde de 10 ans. A regoûter pour confirmer la responsabilité du bouchon, et à terminer rapidement ensuite. Bof

Muscat Réserve Personnelle 1995 – Kuentz-Bas (Husseren-les-Châteaux) : La robe est jaune doré. Le nez est surmaturé, avec des arômes de sous-bois et de pain grillé inhabituels. La bouche est riche et grasse en attaque, puis sèche et minérale avec les arômes du nez qui reviennent en fin de bouche. Connaissant la régularité et la garde des vieux millésimes de cette cuvée, ce millésime 1995 déçoit. A finir rapidement si ce n’est pas une bouteille défectueuse. Bof

Muscat 1994 – Henri Schoenheitz (Wihr-au-Val): La robe est or pâle. Le nez est parfumé, net et pur avec des arômes de sureau, d’agrumes, de menthe et de groseille, très plaisant. La bouche est fraîche, mûre avec des arômes de fruits blancs, puis se montre plus riche avec des notes d’herbe coupée en évolution. On est une fois encore sur un muscat jeune et frais qui passe doucement dans sa seconde phase. Henri Schoenheitz nous avait étonné l’année dernière avec un somptueux muscat 1993, le 1994 est du même calibre. A conserver 15 ans. Très Bien

Muscat Grand Cru Marckrain 1993 – Cave Vinicole de Bennwihr : premier grand cru officiel de la série. La robe est jaune doré, brillante. Le nez est assez complexe, intense avec des arômes de menthe sèche, de fruits mûrs, de silex et de fumée. La bouche est sèche et franche en attaque, puis minérale avec des notes de menthe et de fumée dans la longue finale. Un vin de terroir qui s’exprime bien, et qui se conservera au moins 10 ans encore. Très Bien

Muscat Ottonel Réserve 1992 – Barmès-Buecher (Wettolsheim) : la robe est orangée, tirant sur l’ambre. Le nez est oxydé, dominé par des notes de pomme cuite. La bouche est oxydée, confirmant un vin altéré. Le bouchon est mouillé sur toute sa longueur. A regoûter

Muscat 1991 – Alsace Willm (Barr) : Le vin se montre également oxydé : robe ambre, nez oxydé, bouche décharnée. Le bouchon a mauvaise mine. A regoûter.

Muscat Grand Cru Goldert 1991 – Zind-Humbrecht (Turckheim): La robe est profonde, jaune doré, très brillante. Le nez est intense, avec des agrumes, de l’ortie, du poivre et de la fumée. La bouche est grasse et légèrement moelleuse en attaque, avec une trace de gaz carbonique, puis se montre élégante, très minérale avec une bonne complexité aromatique. Le vin est riche, profond et minéral, bien installé dans un style évolué qui devrait se conserver au moins 20 ans. Très Bien

Muscat 1990 – Becker (Zellenberg) : La robe est or blanc, brillante. Le nez a prix de fines notes oxydatives qui rappellent un xérès, évoluant sur des arômes de menthe poivrée. La bouche est franche en attaque, grasse, sèche et dense, avec une patine agréable. La finale est mûre, laissant apparaître un léger moelleux, avec des arômes de cire et d’agrumes. Un vin mûr qui a bien évolué, à suivre pour déceler des variations de nez d’une bouteille à l’autre. Se gardera encore 10 ans au moins. Très Bien.

Muscat Brandhof 1990 – André et Remy Gresser (Andlau) : La robe est jaune doré, intense, sur des nuances vieil or. Le nez est agréable, encore assez simple, avec des arômes de fruits murs et de réglisse. La bouche est sèche et franche en attaque, puis anisée, intense avec une belle évolution sur de fines notes d’encaustique. La structure est sèche et de corps moyen, mais la pureté de l’ensemble garantit une évolution lente. Un beau muscat entré dans sa phase évoluée. A boire sur les 20 prochaines années. Très Bien

La sélection avait l’air parfaite sur le papier, et une fois de plus, après dégustation les vins les plus intéressants ne sont pas forcément ceux qu’on attendait. Un des problèmes récurrents semble avoir été le bouchage. Que ce soit par choix de boire les vins rapidement (bouchon en aggloméré sur certaines cuvées) ou par accident, certains bouchons ont altéré les vins, ce qui fait douter de la capacité de garde des vins sans rebouchage. Pourtant, comme le montrent les derniers vins dégustés, le potentiel est bien là pour une grande garde. Les nuances complexes d’encaustique, d’épices et de plantes séchées que prennent les vieux muscats sont très agréables à la dégustation, et proposent même de beaux accords avec une cuisine légèrement épicée.

Thierry Meyer

 

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