L'Oenothèque Alsace

Masterclass Alsace de l’hiver – 4 décembre 2010

La dernière masterclass de l’année portait sur deux thèmes. L’apogée des rieslings Grands cru 1999 avec un petit tour d’horizon des styles variés que proposent des vins de terroirs très différents, mais également une réflexion sur les variations de bouteille à bouteilles sur des vins de plus de 10 ans d’âge. L’approche des fêtes de fin d’année a également permis de discuter de quatre sujets, verres en main : le crémant rosé, les vins secs hors riesling, le pinot noir en 2009 et 2008 et les vins de dessert.

L’apogée des Riesling Grand Cru 1999

Le millésime 1999 est aujourd’hui considéré à son apogée pour les rieslings grand crus, avec des cuvées qui accompagnent magnifiquement bien les poissons cuisinés. Pourtant, derrière une appellation aussi vaste de par la diversité des lieux-dits, un petit tour d’horizon a permis de faire la part des différents terroirs. 1999 restera une année marquée par un  climat capricieux, et si la tempête qui a traversé le Nord de la France en décembre 1999 reste dans toutes les mémoires, le temps frais et humide qui a caractérisé la première moitié de l’année a également marqué les vignerons. Maturation lente, développement de maladies dans la vigne dont une forte poussée de mildiou, les perspectives n’étaient pas très bonnes début septembre. Puis ce sont trois semaines de beau temps sec et ensoleillé qui ont permis de parfaire la maturation des raisins permettant un début des vendanges fin septembre pour le crémant et début octobre pour les vins tranquilles. Le retour de l’humidité a entrainé des départs de pourriture noble par endroits, permettant des récoltes de vendanges tardives et sélection de grains nobles mais entrainant également des récoltes de rieslings en surmaturité. La date de vendanges a donc été cruciale pour déterminer le style du vin produit, en sachant de plus que le caractère plus ou moins drainant de chaque terroir allait entrainer un développement de botrytis très variable.  Les cuvées dégustées reflètent cette variation, avec des vins secs sans botrytis, d’autres plus amples et riches dont on sent clairement qu’ils ont été récoltés avec une certaine surmaturité.
L’ouverture de deux voire bouteilles par cuvées a également permis de se rendre compte des variations qui peuvent exister d’un flacon à l’autre d’une même cuvée, que ce soit des problèmes de bouchons clairement identifiés, mais aussi et surtout des problèmes d’étanchéité de bouchon qui entrainent des déviations aromatiques et gustatives difficiles à apprécier comme telles sur un vin déjà marqué par une certaine évolution. L’intensité et la pureté du nez peuvent ainsi varier fortement, tout comme la finesse et la longueur en bouche. Les variations sont reprises ci-après.

Riesling Grand Cru Schlossberg 1999 – Vincent Spannagel : un vin de robe pâle aux reflets citron, avec un nez très mûr sur les fruits mûrs, la poire, des notes de fleurs et une pointe fumée. Le caractère compoté des fruits trahit une certaine évolution aromatique, avant que des notes de tilleul et de verveine viennent compléter l’ensemble. La bouche est moelleuse en attaque, puis pure avec une légère salinité, mais la sensation sucrée persiste et ne s’est pas fondue (environ 10-12 g/l de sucre résiduel). Une vendange passerillée voire légèrement botrytisée a donné un vin riche qui manque de structure pour se révéler au vieillissement, même si la pureté de l’équilibre le rend encore très plaisant à boire. Une première bouteille se montre très pure aromatiquement, mais plus amère en bouche, alors que la deuxième, plus discrète au nez, possède un caractère plus charnu en bouche. A finir. 14.5-15/20.

Riesling Grand Cru Kitterlé Vieilles Vignes 1999 – Schlumberger : Les rieslings provenant de la partie Est du Kitterlé mais également de la parie Sud derrière l’éperon qui surplombe Guebwiller sont généralement utilisés pour produire la cuvé de Grand Cru, mais en 1999 les parcelles situées sur la partie Sud ont été vinifiées et mises en bouteille à part. Situées sur une partie du cru traversée par une veine de grauwacks, le caractère volcanique se manifeste particulièrement bien. La robe est paille, et le premier évoque la roche broyée, la pierre à fusil et toutes les nuances fumées possible, avec des notes florales discrètes qui se dévoilent après beaucoup d’aération. La bouche est droite, tendue par cette minéralité combinée à une acidité franche, sur un équilibre très sec (4g/l de SR) qui termine sur de l’amertume. Le vin possède un caractère austère et bénéficiera d’un carafage long, mais il possède une belle pureté. Une deuxième bouteille est moins nette au nez, rassie avec des notes terreuses au nez qui sont peu agréables. A noter que les demi-bouteilles de cette cuvée dégustées cette année se sont révélées défectueuses, ce qui encourage à n pas trop attendre avant de finir les bouteilles, même si les flacons les mieux bouchés ont un grand potentiel de garde. 14.5-15.5/20

Riesling Grand Cru Altenberg de Bergheim 1999 – Gustave Lorentz : la robe est claire et brillante sans signe d’évolution. Le premier nez est discret, avec des notes de fleurs blanches et de fumées qui mettent du temps à gagner en intensité, évoluant à l’aération sur des arômes de fleur d’acacia, de pamplemousse et d’hydrocarbures. La bouche est ample, sèche malgré les 8 g/l de sucre résiduel bien intégrés, avec du gras et de la profondeur. La fin de bouche possède de la longueur et une certaine finesse. Une cuvée paradoxale, récoltée très tôt sans surmaturité sur un cru très solaire (l’étiquette annonce 12%), qui possède une très belle tenue. Une deuxième bouteille se montre très discrète voire muette au nez, sans que la bouche soit altérée. Une cuvée dégustée plus de sept fois depuis 5 ans, dont les variations qualitatives passent du bon au très grand. Je l’ai déjà mieux goûtée. 15-16/20

Riesling Grand Cru Kirchberg de Ribeauvillé 1999 – Louis Sipp : Le nez est ouvert, agréable avec un savant mélange de notes fruitées et minérales qui rappelle les agrumes mûrs, la pierre concassée et la fumée. La bouche est dense, charnue et de bonne ampleur, avec un équilibre sec et une salinité très présente en comparaison des vins précédents. L’acidité est franche et bien intégrée, la finale de bonne longueur. Une deuxième bouteille se montre légèrement liégeuse en bouche, ce qui rend la finale plus sèche et plus courte. Sur les six flacons que j’ai eu l’occasion de déguster ces dernières années, la première bouteille bue lors de cette dégustation est certainement la plus belle de toutes. 15.5-16.5/20

Riesling Grand Cru Mambourg 1999 – Marc Tempé : La robe est jaune or de bonne densité, avec à l’agitation un aspect trouble et floconneux probablement causé par une casse protéique. Le premier nez est magnifique de pureté, avec des arômes de fleurs jaunes, de fruits à chair blanche, une pointe de fumée et de vanille, évoluant sur un florilège d’épices et de fleurs séchées.  La bouche est tendre, profonde, très saline avec du gras, les 8 g/l de sucre résiduel n’étant pas responsables de la sensation de moelleux qui enrobe l’équilibre. Le vin a été récolté mur sur ce terroir solaire, mais vinifié quasiment sec il se montre moins moelleux que le Schlossberg. Une deuxième bouteille se montrera complètement fermée au nez, sans la patine de la première. 16.5-17.5/20

Riesling Grand Cru Brand 1999 – Zind-Humbrecht : la robe est brillante, avec des reflets argentés sur des nuances jaunes citron. Le nez est d’une grande fraîcheur, avec des arômes d’agrumes, de fruits à noyau, une pointe de sauge et une note de pierre à fusil.  L’attaque en bouche est vivace, charnue, l’acidité et une pointe de gaz carbonique apportant une fraîcheur remarquable qui porte une forte salinité. Le milieu de bouche est marqué par une légère douceur (23 g/l de sucre résiduel) qui disparaît dans la longue finale portée par la salinité. Un grand terroir qui se révèle malgré la récolte très mûre avec un léger botrytis (14% d’alcool malgré le sucre résiduel). Les deux bouteilles sont quasi identiques. 18/20

Les vins de fête, réflexions verres en main

Les fêtes de fin d’année sont l’occasion d’agapes festives nombreuses, en famille ou entre amis, et le choix des vins reste crucial. Choisir le bon vin est surtout choisir le vin le plus adapté à la fête et aux convives. Si on excepte les clubs de passionnés ou les familles de vignerons, qui ne manqueront pas de faire des soirées mémorables, dans les autres cas les rencontres de famille ou d’amis vont rassembler des personnes dont l’appréciation du vin varie fortement. De plus, le contexte de la fête, des retrouvailles en famille et l’excitation des enfants n’est pas forcément propice à une attention digne d’une soirée dégustation au cours de laquelle on décortique les vins pour en tirer un maximum de plaisir sensoriel, intellectuel, émotionnel. Il s’agit donc de choisir les vins en fonction de leur qualité, mais aussi de leur facilité d’approche. Le but étant de se faire plaisir sans effrayer ou gêner la cousine « qui ne boit pas de blanc » ou le tonton « qui ne boit pas de bulles ».
Quatre sujets ont été traités pour alimenter la réflexion avant de préparer le programme des repas de fin d’année.

Le crémant rosé, victime de son succès

Les amateurs de vin qui affichent leur peu d’intérêt pour les vins mousseux ont souvent de bonnes raisons de le faire. Car derrière la vinification d’un raisin peu mûr, une prise de mousse et un dégorgement suivi d’un dosage important peuvent se cacher de véritables tord-boyaux, aptes à déranger les estomacs les plus aguerris. L’acide malique et l’astringence du raisin insuffisamment mûr font mal au ventre, même si le moelleux d’une cuvée voire son service glacé, accompagné d’un trait de crème de cassis rendent le breuvage plus facile à ingérer.
Le développement important du Crémant d’Alsace depuis 10 ans est tel qu’il représente aujourd’hui la moitié des crémants produits en France, et si en 2010 le volume de consommation semble atteindre un plateau, le succès du crémant tient en partie à sa diversification : outre les traditionnelles cuvées produites avec une majorité de pinot blanc et d’auxerrois, on trouve des crémants de pinot gris , de riesling, des blancs de blancs à base de chardonnay, des Blancs de Noirs, et depuis quelques années des crémant rosés.
Produits à base de pinot noir dont la légère macération des peaux avec le moût colore le jus pour lui donner une teinte rose plus ou moins orangée, le crémant rosé est une forme de Blanc de Noirs poussée à l’extrême, la macération apportant la robe colorée. Par association d’idées, on pense donc tout de suite aux arômes de fruits rouges, et éventuellement on s’attend à une certaine douceur. Si le Kir Royal a connu un certain succès par le passé, lorsqu’il était confectionné avec du crémant de mauvaise qualité
Promesse d’un vin fruité légèrement doux ou pas, le Crémant Rosé subit un tel succès que de nombreuses maisons se sont mis à en produire, et  pas uniquement les grands opérateurs. Malheureusement le pinot noir est un cépage délicat, qu’il faut récolter à la bonne date pour avoir un fruit et des tanins mûrs, si possible avant que la pourriture le fragilise. C’est un cépage difficile à manipuler en cave si on veut conserver  la pureté de ses arômes, et l’élaboration du crémant rosé est peut-être plus difficile  que celle des autres crémants. Quelques irréductibles arrivent à produire de belles choses : Lucien Albrecht à Orschwihr, Jean-Claude Buecher à Wettolsheim, Claude Weinzorn à Niedermorschwihr, La cave de Beblenheim, Allimant-Laugner à Orschwiller, le domaine Pfister à Dahlenheim…
Chez les grands producteurs que sont les plus grandes caves coopératives, la qualité est malheureusement souvent condamnée à baisser, la forte demande en crémant rosé forçant à réduire les durées d’élevage ou de garde en bouteille après dégorgement, voire à diminuer la qualité moyenne des pinots noirs utilisés. On se retrouve alors avec des crémants au nez réduit voire pas net, avec un moelleux en bouche qui masque mal une matière floue. Les trois crémants dégustés ont permis de se faire une idée de l’échelle qualitative.

Crémant Brut Rosé – Cave Bestheim : un rosé qui manque de fruité au nez, marqué par une pointe de réduction mais surtout des arômes pas très nets, moelleux en bouche avec de l’amertume et cette note aromatique peu avenante qui accompagne la finale. Frais ou tempéré, le vin n’est pas très plaisant. 11.5/20 2010-2013 (dosage 12.5 g/l)

Crémant Brut Rosé – Cave de Beblenheim : la robe saumonée annonce un vin net au nez discret de petits fruits rouges, vineux avec un fruité de grande pureté en bouche. La mousse compacte, la bulle fine et une acidité très présente équilibrent un dosage assez important (12 g/l), rendant le crémant très apéritif. Une très bonne réussite en crémant rosé, et un superbe rapport qualité prix à 5.55€ la bouteille en cette fin d’année 2010. 14.5/20 2010-2012

Crémant Brut Rosé – Wolfberger : léger de robe avec des nuances orangées, le crémant se montre discret au nez, avec une légère réduction et des notes de fruits cuits, à peine plus net que le crémant de Bestheim. La bouche est fluide, d’assez bonne pureté, mais conserve un dosage important qui alourdit l’équilibre. La cuvée Chardonnay ou la cuvée prestige se dégustent nettement mieux. 12.5/20 2010-2011

En l’absence de crémants nets et fruités, le marché se tournera peut-être vers les produits pus classiques, voire sur des crémants aromatisés comme on les pratique déjà dans le Jura. La cuvée de Kiro’z’épices de la cave de Ribeauvillé assemblant épices de noël et crémant connaît un succès croissant, tout comme la cuvée à la liqueur de safran lancée cette année par la même cave. L’avenir nous dira à quel rythme la mode du rosé passe.

Les vins secs hors riesling

Si les poissons nobles et les fruits de mer sont fréquemment servis sur les tables de fin d’année, la grande palette de rieslings disponible en Alsace offre de quoi faire de magnifiques combinaisons. Pourtant, les vins secs d’autres cépages peuvent offrir des équilibres tout aussi plaisants, sans rester dans la note acidulée et agrumes des rieslings. Pour satisfaire les convives « qui ne boivent pas de riesling » ou proposer une alternative au classicisme, les pinots blancs et sylvaner offrent de belles perspectives, les 2007 et 2008 dégustés lors des différentes masterclass cette dernière année l’ont largement montré. Deux vins sont mi aujourd’hui en avant, le chasselas, cépage peu vinifié seul et qui produit des vins remarquables lorsqu’ils sont secs. Et les pinots gris, qui deviennent plus secs à la faveur d’une clientèle qui change doucement ses habitudes, surtout sur un millésime 2008 particulièrement intéressant puisqu’il est sain et de haut niveau d’acidité.

Chasselas 2007 – André Kientzler : un chasselas plus aromatique que ses voisins suisse et savoyards, au nez de fleurs blanches qui prend un ton plus minéral avec l’âge. La bouche est sèche, saline et légèrement acidulée avec une légère amertume en finale. Un vin magnifique de fraîcheur, qui pourrait se conserver un peu plus longtemps si le bouchage synthétique ne commençait pas à montrer ses limites. 15/20 2010-2012

Pinot Gris Tradition 2008 – Domaine Pfister : un vin franc et frais au nez de fruits à noyau avec une note de froment, sec et charnu en bouche avec une acidité digne d’un riesling sans en avoir l’amertume en finale. Un vin versatile à consommer sur les repas du soir, lorsque le menu gastronomique du déjeuner laisse place aux tourtes crudités, pâtées en croute et autres gourmandises de repas du soir. 15/20 2010-2016 (7 g/l SR)

Pinot Noir : 2009 s’annonce riche et coloré, mais n’oubliez pas 2008

Comme dans toutes les régions viticoles septentrionales, les millésimes chauds sont considérés comme grands car ils permettent à la majorité des producteurs de récolter des raisins mûrs et non altérés. Même si le risque est depuis 2003 de souffrir des excès de chaleur. Car depuis 20 ans le réchauffement climatique a donné des millésimes chauds de manière plus régulière, au point que si on regarde les dates de vendange, deux années sur trois dépassent depuis 10 ans les records de chaleur qui faisaient des millésimes exceptionnels dans les années 50-60. Après un millésime 2003 qui a surpris plus d’un producteur alsacien par la densité des robes des pinots noirs produits, 2004, 2006 et 2007 se sont montrés plus légers. 2005 s’est montré très mûr sans excès, et si 2008 fut rapidement connu pour la droiture de l’acidité des vins blancs, les rouges ont été quelque peu éclipsé par la perspective du millésime 2009, à nouveau chaud et favorable aux pinots noirs de grande richesse.
Malgré tout, il faut se pencher sur 2008 car grâce à une vendange mûre et saine sur une arrière saison fraîche, le pinot a conservé son fruité délicat sans sombrer dans la confiture. Les rouges sont peut-être plus légers de couleur qu’en 2005 ou 2009, mais le fruité net et l’acidité en font de parfaits représentants du style alsacien, avec sur les meilleurs terroirs des grands vins d’une précision incroyable. 2009 est pus riche, plus coloré, plus ample, parfois plus tannique, il donnera une meilleure première impression à ceux qui cherchent la couleur, la densité, et qui trouvent agréable que le pinot noir se mette à ressembler à un Carignan su Sud de la France. Il y aura bien entendu de grandes réussites en 2009 sur les grands terroirs alsaciens, mais les premières dégustations réalisées cette année montrent que ces grands terroirs ont produits des vins équilibrés, au niveau d’alcool mesuré : la Cuvée Cœur de Bollenberg 2009 de François Schmitt à Orschwihr ou de Clos Saint Landelin chez René Muré à Rouffach dépassent à peine 12.5-13% d’alcool avec une parfaite maturité physiologique, bien loin des cuvées à 14.5% voire 15% d’alcool qui ont fait la fierté des vignerons les plus sensibles à la puissance et à la couleur.
Vinifiés avec une bonne extraction, les deux cuvées 2008 et 2009 de Guillaume Mochel formant une paire parfaite pour montrer les qualités des deux millésimes, et surtout confirmer leur usage à table. Si 2009 sera servi (après passage en carafe) sur des viandes en sauce, des fromages à pâte molle ou une cuisine riche et épicée, 2008 sera parfait sur une pièce de bœuf grillée, des tourtes à la viande ou tous les plats qui s’accommodent très bien d’un blanc comme le baeckeofe.

Pinot Noir 2008 – Frédéric Mochel : robe claire d’un rubis brillant, arômes frais et franc de cerise, beau fruité mûr en bouche avec des tanins fins qui restent discrets. Un style alsacien parfaitement exécuté, combinant la pureté du fruit avec une acidité fine. Un beau pinot. 14.5/20 2010-2016

Pinot Noir 2009 – Frédéric Mochel : Robe profonde, violacée, opaque. Nez marqué par la mûre, le chocolat et des notes de cerise noire. Elégant en bouche avec des tanins encore marqués qui assèchent la finale, voilà un vin de bonne extraction qui gagnera être conservé quelques années pour qu’il gagne en souplesse. 14/20 2013-2019

Les vins de dessert – et si le vin était le dessert ?

Le dessert d’un repas de fête clôture généralement plusieurs heures à table, et si les occasions sont souvent rares d’ouvrir les plus belles VT et SGN qu’on a dans sa cave, a bûche glacée ou le panier de fruits n’appelle pas forcément un vin, à fortiori une très belle bouteille qu’on a précieusement gardée dans sa cave. On préfèrera le café, le thé, de l’eau finement gazeuse, voire une eau de vie de fruits pour faciliter la digestion.
En revanche, les grands vins considérés comme « de dessert » sont de parfaits desserts à déguster pour eux même, peut-être en compagnie de quelques gâteaux sablés tels les fameux bredele alsaciens. En fin d’après midi, de retour d’une promenade digestive, partager une bouteille avec tous les convives autour de quelques châtaignes grillées, de biscuits sablés, ou du fameux baerewecka alsacien est un grand moment. On choisira un vin très jeune porté par la finesse des arômes et la pureté de sa texture, ou au contraire un vin plus âgé, dont on laissera les arômes se développer lentement dans le verre avant d’apprécier sa texture patinée par le vieillissement. Plus que le niveau de sucre, c’est bien la complexité de la bouche qui font des ces grands vins de dessert des grands vins à boire pour eux.
Les deux cuvées dégustées sont celles servies avec le dessert du diner de fin octobre 2010, mais dégustées hors repas, elles se montrent remarquables chacune dans leur style, sans qu’un quelconque accord vienne perturber leur appréciation. Une démonstration facile à faire de l’intéret de déguster les grands vins de dessert pour eux-même et une belle manière de terminer en beauté la dernière dégustation de l’année.

Pinot Gris Altenbourg Vendanges Tardives 2008 – Albert Mann : une belle trame saline pour ce vin puissant au moelleux parfaitement intégré, qui possède une grande pureté de texture. Les arômes de pêche mûre et de miel sont encore très jeunes au nez, mais si un longue garde patinera l’équilibre, l’équilibre acidulé du vin jeune est déjà très plaisant, le rendant délicieux à boire à petites gorgées. 18.5/20 2011-2028 (11.5%, 116 g/l SR, 8.1 g/l AT)

Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles "S" 1989 – Hugel et Fils : la robe est typique du millésime avec des nuances d’or très lumineuses, donnant des reflets brillants très lumineux. Le vin offre des grosses larmes sur les parois du verre, qui dessinent un jambage épais. Le nez est complexe, ouvert et se dévoile par paliers : miel, thé, raisin de Corinthe, menthe séchée, chocolat, noisette, fruits confits, fumée, amande grillée. La bouche est ample, moelleuse en attaque avec une liqueur fondue bien intégrée au caractère charnu du milieu de bouche. Les plus de 150 g/l de sucre résiduel sont parfaitement intégrés. Belle patine du temps et finale très longue. Partagé en fin de repas avec une douzaine de convives au moins, quelques centilitres par personne suffisent à apporter du bonheur pour cette cuvée à maturité qu’on pourra heureusement encore acheter sur place à Riquewihr (82€ TTC). 19/20

Thierry Meyer

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